C’est déjà la fin de l’été : l’heure de faire le point sur les meilleurs rendez-vous électroniques et clubs qui ont rythmé la saison estivale. Si de nombreux évènements hexagonaux ont réussi à faire danser une armée de fans et programmer les artistes les plus en vue du moment, ce n’est pas ce qui a attiré le plus notre attention. Peut-être une envie partagée de revenir à des festivals à taille humaine, sans folie des grandeurs ni système de sécurité XXL. Retourner à l’essentiel : la musique, le partage, les rencontres et une ambiance bienveillante et safe. C’est pourquoi, dans ce flashback de la saison 2023, nous souhaitons vous parler d’un petit festival dont vous n’avez certainement jamais entendu parlé, mais qui nous a fait vivre nos meilleures heures de danse cette année. Jauge limitée, attention toute particulière au système son, lieu atypique, line-up léché et éclectique… on vous raconte !
Toutes les photos de cet article sont au crédit de @sachafemme.
Fin mai, nous nous sommes rendus dans un nouveau festival de musiques électroniques prometteur : Le Petit Caisson. Organisé par une bande de potes, tous passionnés de son, cet évènement en est déjà à sa troisième édition et commence à tranquillement trouver sa place dans le paysage hexagonal de la teuf. Pour résumer l’expérience : trois jours dans la campagne normande, sous un soleil radieux, rythmés au son de deux scènes et d’une trentaine d’artistes aux genres variés (house, techno, trance, disco, break…) qui s’y sont succédé. On a même eu la chance de s’entretenir avec deux talents qui ont cassé le dancefloor : Jena et Lexi. Interviews à lire en fin d’article ! Première étape du voyage, un trajet en bus de deux petites heures le vendredi soir, déjà très festif et convivial, direction la petite ville de L’Aigle, en Normandie. Arrivé·es sur le site à la tombée de la nuit, on est séduit·es d’emblée par la beauté de la nature environnante : il s’agit du parc d’un château viticole somptueux. Les deux scènes sont placées judicieusement face au château pour la première (active de 22h à 10h) et dans une grange pour la seconde (de minuit à 6h). On apprécie le fait qu’il n’y ait aucune barrière sur le terrain, on peut circuler librement – ça change tout par rapport aux festivals pour lesquels on doit traverser, avant toute chose, 3 ou 4 étapes de sécurité. On remarque tout de suite une ambiance chaleureuse et bienveillante, qui ne va pas nous quitter durant les trois jours. Le public n’est pas simplement spectateur de l’évènement mais il en est acteur. Il participe à faire de ce rendez-vous intimiste une bulle de joie, de partage et de son pour bien débuter la belle saison. On trouve notamment un bar et une zone chill sur un terrain de tennis, le camping au milieu des vignes ou encore des stands variés au cœur d’une vallée verdoyante : tous les ingrédients sont réunis pour se connecter aux autres et lâcher prise complètement.
Parmi les sets qui ont marqué cette troisième édition, on trouve Baume, talentueux DJ et producteur originaire de la Drôme et maintenant basé près de Lyon. Pendant son passage, la magie a opéré : une connexion parfaite entre l’artiste et le public, en harmonie avec les éléments. On a fortement apprécié également le set du parisien Botwin, membre de la célèbre agence Everybody Trance, notamment aux côtés de Desire, Maelita et Binary Digit. Enfin, on a encore une fois pris notre pied sur la magistrale MZA, qui n’en est pas à son premier passage puisqu’elle avait déjà enflammé la main stage l’année dernière. En résumé, que des bonnes vibes pour cette édition 2023. Nous venons d’apprendre qu’une édition hiver se prépare : une bonne occasion de renouveler l’expérience. On ne manquera pas se suivre de très près l’évolution de ce collectif qui nous a offert nos meilleurs souvenirs de cet été. Retrouvons tout de suite deux artistes du festival avec qui nous avons eu la chance d’échanger : Jena et Lexi.
JENA
La Vague Parallèle : Comment as-tu commencé à mixer ? Jena : J’ai toujours beaucoup écouté de son, mais c’est en arrivant dans l’association Nymphony, de l’école de Gestion de Grenoble, que j’ai pu approfondir ma pratique. Il y a un partage de connaissances et une transmission énormes dans cette asso, les gens écoutent de tout, de la minimale, de la techno, etc. On organisait des week-ends pour apprendre entre nous, ça a accéléré notre apprentissage ; puis des petits évènements vers Grenoble pendant 2 ans. Par la suite, j’ai rejoint un collectif de Nancy qui s’appelle Make Your Transition, j’y ai apporté ma petite expertise et maintenant on organise des évènements dans l’Est. Pour le DJing, c’était la suite logique ! À force d’observer mes ami·es, j’ai eu envie de créer mes propres sets. LVP : T’es-tu lancé dans la production en complément du mix ? Jena : Oui, je produis un peu aussi. Pour l’instant je n’ai rien sorti mais j’ai créé pendant le confinement des réinterprétations musicales d’œuvres littéraires. J’ai choisi des textes que je kiffais, puis je produisais des morceaux de différents styles – cold wave, early trance à 155 BPM, electro chill – pour les illustrer. Par exemple, j’ai travaillé sur la Préface de Dorian Grey [roman d’Oscar Wilde, ndlr], qui s’articule autour d’une réflexion sur l’art et l’artiste, ou El Desdichado, le fameux poème de Gérard de Nerval, qui commence par “Je suis le Ténébreux, le Veuf, l’Inconsolé”, ou encore le poème plein d’emphase Alone d’Edgar Allan Poe. LVP : Est-ce que tu as envisagé d’en faire ton métier ? Jena : Plus ou moins, je pense que la partie artistique, c’est plutôt un truc personnel, un kif. Mais toutes mes études, mes stages, je les ai orientés dans la musique. J’ai des expériences en label, dans une agence de booking orientée techno, en service de billetterie… La musique est donc, en quelque sorte, mon métier.
Photo de Jena prise pendant son set lors du festival
LEXI
LVP : Quel est ton premier souvenir de mix ? Lexi : La quatrième fois que je touchais à des platines de ma vie, j’ai eu l’opportunité de jouer devant des gens pour un mini-festival, grâce à un pote. Il y avait une cinquantaine de personnes et il s’est passé quelque chose, les gens étaient à fond. Ça m’a lancée, j’ai acheté du matos et je me suis lancée sérieusement dans le DJing. LVP : Par la suite, qu’est-ce qui t’a poussé à devenir pro ? Lexi : Il y a deux ans, on a créé le collectif féministe Venus Club et on a commencé à avoir des dates dans des bars, puis dans des clubs. Grâce à ce projet, on pousse les femmes et personnes non binaires à se professionnaliser dans la musique électronique. Ensuite, j’ai joué à Vryche-sur-Yvette, pour le festival du même nom, et pour cette occasion j’ai acheté un matériel professionnel avec Xone, etc. Depuis quelques mois, j’ai investi dans deux platines vinyles donc j’essaye de me mettre au mix vinyle, pour jouer des morceaux années 90, trance. Pas mal de chose de seconde main, à force de fouiller des heures sur Discogs. J’aime beaucoup aller dans des magasins de disque, en France ou à l’étranger pour ramener un souvenir de voyage. LVP : Peux-tu nous en dire plus sur les projets du Venus Club ? Lexi : L’année dernière, on a mis en place Le Sillage du Vénus, dans le club parisien Glazart, qui consiste en un accompagnement pour celles qui veulent se lancer, via des sessions sur plusieurs mois, soit sur digital, soit sur vinyle. Également, on a lancé les Osmose Cast, programme de podcasts bi-mensuel dans lequel on invite des femmes et personnes non binaires venant de plein de ville en France. On a eu la chance d’avoir été bien accueilli·es sur la scène, de nombreux collectifs nous ont ouvert leurs portes, donc on essaye de faire pareil avec la prochaine génération.
Photo de Lexi prise pendant son set lors du festival
Entre Paris, Berlin, concerts de rock et clubs techno, j’me balade.