cheapjewels : rapper l’obscur pour rêver la fracture
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Auteur·ice : p.tx
05/05/2025

cheapjewels : rapper l’obscur pour rêver la fracture

| Photo : Melissa Fauve

Vous avez déjà sûrement entendu parler de cheapjewels. On vous avait parlé d’elle pour la sortie de son premier EP.  Cette fois, on a eu envie d’apprendre à la connaître plus en profondeur. On lui a donné rendez-vous sur la place Morichar pour un entretien. En haut de la place, assis·es sur les marches en pierre, on pouvait apercevoir au sol sur le bitume écrit à la peinture blanche :  « Refugees welcome <3 » , « Free Palestine de la mer jusqu’au Jourdan », « On roule sur le patriarcat », ainsi qu’un dessin aux couleurs du drapeau palestinien.

La raison qui nous a poussé·es à vouloir connaître cheapjewels plus avant a été l’incroyable puissance qu’on a ressentie le 14 mars dernier au Continental pour la sortie de son premier EP intitulé :c la fin du dream ?. Vivier riche, il a été le point de départ d’une réflexion à propos du « rap » sur le mode : « que peut le rap en tant que force de résistance ? ». On aurait pu écrire une thèse en prenant le geste artistique de cheapjewels comme point de départ, mais pas d’inquiétude, rien de tout cela… À la place, on a eu envie qu’elle nous raconte, elle-même. Il était 15h10, Melissa Fauve, photographe à LVP et équipière de choc, est arrivée. L’entretien a débuté.

La Vague Parallèle : Salut cheapjewels, merci d’avoir accepté cet entretien. L’exercice n’est pas facile et nous te remercions de t’être pliée au jeu avec nous. On avait envie de commencer par te demander : est-ce que tout est alright ?

cheapjewels : Là, franchement, tout est alright ! (Rires). Ça va mieux, je sors d’une période assez chargée. Mais ça commence à s’arranger. Du moins, en ce qui concerne ma vie personnelle. Après, de manière plus large… c’est le chaos, la montée du fascisme est partout, ça ce n’est pas alright. 

LVP : D’où viens-tu ?

cheapjewels : J’ai grandi à Saint-Étienne. Je pense qu’on pourrait la comparer avec Charleroi : une ville moyenne, entourée de terrils, post-industrielle. J’y ai vécu jusqu’à mes 17 ans. Ensuite, lors de ma dernière année de lycée, j’ai obtenu une bourse pour partir à Madrid au lycée français. C’était le choc des cultures. J’étais entourée d’enfants de diplomates. C’était intéressant et bizarre. Je vivais dans une famille d’accueil. Puis j’ai eu le bac et je suis partie à Strasbourg pour faire une fac en art du spectacle. Après un an, des potes m’ont encouragée à passer des concours en Belgique.

Je voulais devenir comédienne à la base ; c’est comme ça qu’en 2018, j’ai commencé une école de théâtre (ARTS²) à Mons. J’y ai vécu pendant 4 ans en intermittence, dont la période de la COVID. Pendant le confinement, ma politisation a commencé : j’ai vécu en squat, rencontré plein de gens, fait plein d’actions, c’était une phase assez intense. Après quatre ans, j’ai arrêté le théâtre, ce n’était pas un environnement très sain… Il y avait beaucoup de profs abusifs et des situations de merde dans ma promo avec du racisme et du sexisme.

LVP : Pourrais-tu, cette fois, nous dire d’où tu viens musicalement ? 

cheapjewels : De mes 5 ans à mes 15 ans, je dirais que ce sont vraiment les chansons à texte, la variété française, mais aussi le rock et le jazz avec mon père. Ensuite, à l’adolescence j’ai vraiment été prise par la vague rap de 2015. Je pense à SCH, 1995, PNL, plus petite j’étais aussi fan de Sexion D’assaut. Ce sont des gens qui m’ont touchée à un moment donné. Ils ont pu me permettre de pouvoir m’opposer à certains trucs, comprendre le monde. J’aime trop le rap ! C’est cette musique qui m’a portée et que j’ai le plus écoutée. Et ouais, c’est vraiment la pratique du rap qui m’a poussée à découvrir des choses, comme la production ou l’électro. La musique avec des basses ça me parle ! (Rires)

LVP : Tu travailles seule mais aussi au sein du collectif Gender Panik. Tu pourrais nous en dire un peu plus ?  

cheapjewels : Avec des potes on a organisé des open mic dans lesquels on a vite remarqué que c’était toujours les mêmes personnes qui prenaient le micro. On a eu envie de créer un endroit dans lequel tout le monde pourrait se sentir plus à l’aise de se lancer. Gender Panik est né comme ça ! Le collectif rassemble une quinzaine de personnes (sans mecs cis hétéro), dont des producteur·ices, des rappeur·euses, des chanteur·euses… mais pas seulement. Nous sommes toustes de milieux très différents, sans avoir les moyens de faire ce qu’on veut. Donc on a eu envie de faire « un braquage institutionnel ». L’idée à été de demander une bourse (qu’on a eue) pour pouvoir faire du son ensemble dans des résidences. Il y a des gens qui rappaient depuis longtemps, d’autres qui venaient de commencer, d’autres qui avaient déjà un peu de notoriété, d’autres pas du tout.

LVP : Que ce soit seule ou en collectif, il nous a semblé que l’aspect DIY (Do it Yourself) est très présent.

cheapjewels :  Je pourrais dire que « je viens du bricolage ». Pour moi bricolage est synonyme d’autonomie par rapport à certains cadres. C’est synonyme de liberté dans la possibilité d’emprunter pleins de chemins différents. Avec Gender Panik, on essaye de s’organiser matériellement pour essayer de faire de la musique ensemble. Du coup on a fait des résidences en mixité choisie pour essayer de se former à la technique, au son et à l’écriture. C’est comme ça que j’ai commencé à faire du son. Je pense aussi au fait qu’une des bases pour faire une instru c’est le sample. Ça renvoie également à cette idée bricolage : prendre des petits bouts de son et en faire des morceaux aboutis et qui tiennent la route. Après, je ne vais pas vous mentir, parfois j’aimerais ne pas en faire ! Parce que c’est beaucoup d’énergie, qui parfois nécessite d’être placée ailleurs. 

LVP : Ton EP :c la fin du dream ? est ton premier gros projet. Il comporte quatre titres que l’on va passer en revue. Mais avant de parler de l’EP, nous voulions parler du « live », car il nous semble que c’est une partie importante du projet. On voit que tu joues avec certaines postures, certaines intonations et effets qui ne sont possibles que dans une performance live…comment envisages-tu cet aspect ?

cheapjewels :  J’aime trop le live ! Je suis mille fois plus à l’aise en live qu’en studio. J’aime le côté risqué du face à face avec le public. Ça me permet de me confronter à des expériences, de tester des trucs et d’avoir en retour les sensations du public. C’est aussi un moteur de travail qui me permet de me sentir plus à l’aise dans ma pratique. Par contre, ça ne m’empêche pas d’avoir des moments de malaise… entre deux chansons par exemple ! (Rires).

Quand la chanson démarre, tu rentres dans le personnage et tu fais ton maximum. Ces textes je les ai écrits et j’ai envie de les raconter sur scène. Et puis, avec la prod et la musique, ça donne encore plus envie de me jeter dedans (rires). Mais une fois que la chanson s’arrête… je reviens à la réalité et je me demande tout d’un coup : « mais qu’est-ce que je suis en train de faire ? » J’ai l’impression de devoir dire quelque chose et là, catastrophe ! Je raconte n’importe quoi…(rires) Du coup, mon amie et dj SeniKaïd lance une prod et je sais que je dois me taire et commencer à chanter. (Rires)

LVP : « c l’minimum » ouvre l’EP. Son puissant aux ritournelles impossible à oublier. Comment t’est venue l’idée ?

cheapjewels : Franchement, je ne sais pas, j’étais en colère sûrement. (Rires) Mais en vrai, il y a un fond de vérité là-dedans. Dans l’EP, y a pas mal d’impulsions qui partent de la colère. Je suis partie d’un freestyle (j’en faisais pendant un moment sur les réseaux). J’ai gardé le couplet et cet été, on s’est retrouvé·es en studio avec des copaines en Bretagne qui m’ont fait une prod. Le défi a été d’arriver à faire un truc puissant tout du long et donc d’essayer de faire un son à punchline, un peu comme Booba peut faire. (Rires)

Je me disais que chaque phrase devait être une citation. Ce n’est pas quelque chose que je faisais dans mon écriture, parce que souvent je déplie, il y a plein de phrases qui a priori ne servent à rien, mais qui en réalité sont essentielles pour instaurer un contexte et une ambiance. Et là j’ai eu envie de faire un son efficace, dans lequel tu peux te prendre chaque punchline et jouer sur un double sens et voir la réaction des auditeur·ices. Un son qui fait du bien et qu’en même temps tu peux crier en manif !

LVP : À un moment donné dans c l’minimum, tu dis : « est-ce que tout rappeur blanc fait du rap de client ? ». Quel regard portes-tu sur la place des rappeur·euses blanc·hes dans le game ?

cheapjewels : J’ai un rapport assez conflictuel avec cet aspect-là. D’un côté, il y a toustes ces artistes qui m’ont parlé quand j’étais plus jeune et qui m’ont fait entrer dans l’univers du rap. Mais j’ai vite été mal à l’aise quand j’ai compris que ces personnes ne prenaient pas position et parlaient à la tranche majoritaire des médias, qui ne défendaient ni le rap ni les systèmes de valeurs propres à cette culture. Les médias les mettaient en avant parce qu’ils étaient blancs et bourgeois, ça devenait donc le rap “acceptable” face à pleins d’autres rappeur·euses tout aussi doué·es qui ne se faisaient pas du tout promouvoir sur ces plateformes. En plus, ces même rappeurs, propulsés au rang d’égérie, c’est tous des espèces de fuckboys cringes, alors maintenant en vérité, j’ai fait un gros tri et je ne les écoute plus. Mais quand j’ai moi-même commencé à faire du rap, je me suis posée la question de ma légitimité. J’ai eu envie de me positionner, faire du rap oui ; mais pas pour devenir ce que je déteste !

J’avais envie d’écrire parce que je voyais et vivais des choses qui me révoltaient ! J’avais envie de mettre le bordel. Cette phrase « est-ce que tout rappeur blanc fait du rap de client ? », c’est un moyen de faire mon auto-critique. Remettre en question des goûts que j’ai pu avoir à des moments de ma vie.  Cette phrase c’était une manière de me poser la question et de pouvoir répondre : « ah, moi, je crois que je n’ai pas trop envie de faire ça… ». L’énoncer pour essayer de l’éviter. Comme un sort, une formule qui me met au défi ! Car je vois qu’en tant que meuf blanche de classe moyenne qui fait du rap « politique », j’ai des opportunités que d’autres n’ont pas… Mais je ne suis pas dans l’idée qu’il faut absolument faire de la musique “engagée”, chacun·e raconte ce qu’iel veut, ce qui la·le touche. La simple existence de certaines personnes dans l’espace médiatique est politique ! Juste moi, dans ma pratique, orienter ma violence, ça donne du sens.

LVP :  Nous avions une autre phrase à te soumettre : « J’ai plus de potes qui veulent se tuer que de potes salariés ».

cheapjewels : Je pense que c’est ma meilleure punchline depuis que j’ai commencé. J’adore cette phrase. C’est vraiment parti d’un constat. Quand j’ai commencé à écrire c l’minimum! j’avais des petits bouts, mais il me manquait toute la partie avec les « alright »… J’avais en tête de trouver vraiment les punchs les plus trash au milieu pour jouer avec le « tout est alright ». Et comme souvent, j’appelle des copines quand je n’ai pas d’idées… (rires) J’en ai discuté avec une amie qui m’a dit que je n’étais pas assez « horrible », que tout était trop gentil (rires). Grâce à elle, j’ai pu aller dans des choses plus trash qui finalement se vérifiaient.

LVP : Le deuxième titre de ton EP, rockstar, est un morceau avec une vibe différente. On le classerait volontiers parmi les bangers plus “classiques” du rap. Tu nous racontes ?

cheapjewels : Je l’ai écrit il y a longtemps et je sens que quelque chose n’est pas abouti, mais j’adore l’énergie qu’il dégage en live. Il a un truc un peu à la fois positif et tranchant. J’y joue avec tout ce délire de l’ego trip : « Il faut que je mène ma vie, faire le show comme Destiny ». C’est vraiment sur le mode de « non mais t’es qui toi ? ». J’avais acheté la prod sur YouTube…(rires) Mais en parallèle je commençais déjà à travailler avec les beatmakers qui ont bossé avec moi sur l’EP. J’ai voulu le garder dans :c la fin du dream ? parce que c’était la première fois (à l’époque) que je sentais une nouvelle vibe dans l’écriture et aussi parce qu’on a fait un clip avec des potes qui est sorti il n’y a pas longtemps.

LVP : On a particulièrement adoré le moment où tu dis : « J’mens si j′te dis qu’j’ai pas besoin d′public / (Ouh la menteuse) / Faut qu’j′mène ma vie / Faire le show comme Destiny ».

cheapjewels : Vous n’êtes pas les premières personnes à me parler de ce « Ouh la menteuse ». Perso ça me ramène à cette image du petit diable sur mon épaule qui dit : « mais en vrai, dans ta vie, qu’est-ce que tu mets en place pour que ça change ? » C’est le genre de moments où je fais face à toutes mes contradictions : être introvertie mais kiffer être sur scène, le besoin de reconnaissance, l’industrie musicale et mon militantisme…

LVP : On en vient au troisième titre de ton EP qui s’intitule alalala et dans lequel tu parles de la mort d’un ami. Tu commences par cette phrase : « Alalala, c’est trop émotionnel / Amis comme feuille tombe, c’est l’hiver »…

cheapjewels : J’ai écrit cette chanson après la mort d’un ami. C’était une période où j’ai tout arrêté dans ma vie, sauf le son… Parce que c’était quelque chose que je pouvais faire seule, avec cette idée de l’écriture comme un moyen pour moi d’essayer de digérer la situation. Ça me faisait du bien de partager ensuite avec mon groupe d’ami·es qui faisait également face au deuil.

Et puis est venu le moment de la chanter en live devant des inconnu·es. C’était une expérience assez intense, même si les gens n’étaient pas au courant, la chanson plaisait beaucoup. C’était intéressant de voir l’impact émotionnel fort qu’elle provoquait.

À dire vrai, cette chanson me touche beaucoup et elle m’a permis de m’ouvrir auprès de mon cercle proche. Étant assez réservée, je sais que parfois j’ai du mal à me faire comprendre. Iels ont pu avoir accès à la façon dont je pouvais vivre ce moment douloureux que nous partagions. Iels ont également apprécié la façon que j’ai eu de transformer ce moment. Je voulais rendre un hommage à cet ami mais aussi aborder les questions du suicide et du deuil. 

LVP : Il y a une quatrième et dernière chanson que tu as titrée c pas moi c mon PC.

cheapjewels : C’est la plus récente du projet. J’étais chez ma mère, il n’y avait pas de réseau. (Rires) Ce n’est pas une blague, elle faisait des travaux et il n’y avait pas de wifi dans ma chambre… j’étais saoulée (rires). J’ai commencé à écrire : « il n’y avait pas de réseau dans… » et après c’était parti. J’avais envie de faire un son un peu méta, parce que j’avais littéralement passé un an devant mon ordinateur. J’en suis venue à me questionner sur la relation hyper bizarre que l’on a avec nos objets électroniques et la technologie en général. J’aime mon ordinateur et tout d’un coup, j’ai fait un lien et je me suis demandée : « est-ce que je suis triste, ou alors c’est mon ordinateur qui me rend triste ? » C’est comme ça qu’est venue l’idée du refrain et puis le son était parti.

LVP : Est-ce que tu dirais que ce projet et les chansons qui en font partie suivent un fil conducteur ou alors c’est plutôt au gré de tes expériences que les sons arrivent ?

cheapjewels : Je crois que finalement, mis à part Alalala, je ne sais pas si je pourrais dire qu’il y a un thème ou un fil clair et net qui se déroule de mes chansons. Je crois que j’hérite plutôt d’une vision fragmentée qui mélange tout un tas de sujets différents. Je fonctionne beaucoup par association d’idées. Dans mon téléphone c’est le chaos : il y a des bribes de trucs, des mots notés par-ci par-là… Parfois je mélange des trucs que j’ai pu écrire il y a cinq ans qui ressortent et prennent sens autrement. Je me demande si les gens arrivent à se projeter dans ce que je dis… ou si, au contraire, c’est trop morcelé.

Souvent, les refrains et les ponts arrivent en premier. Et puis je me dis que quelque chose est pas mal et j’essaye de tirer un fil en parcourant différentes thématiques. J’essaye également de jouer sur des rimes (même si je n’en utilise pas systématiquement). J’aime bien faire des sauts entre les choses… J’aime bien l’idée de la pensée et de l’écriture comme une divagation.

LVP : Nous avons déjà abordé la question du collectif plus haut. Il nous a semblé que c’était présent d’une manière ou d’une autre dans tout ce que tu entreprends. Tu pourrais nous développer encore un peu cet aspect-là ? 

cheapjewels : La place du collectif est centrale dans ce que je fais, puisque je peux dire que le moment « où je me suis trouvée » c’est le moment où j’ai rencontré des grands groupes de gens avec qui j’ai fait des choses, que ces dernières soient de l’ordre du politique, de l’intime, de l’organisation matérielle ou de la fabrication de matière artistique. Le collectif a, je crois, vraiment donné du sens à ma vie et m’a aidé à mieux me situer dans ce monde. Je trouvais ça trop beau de s’organiser en collectif. Ça donne de la force et ça renforce l’efficacité. J’ai eu la chance de rencontrer les personnes de Gender Panik, parce qu’on se donne de la force mutuellement pour nos projets collectifs et individuels.

Dans la vie quotidienne aussi, le collectif prend une place importante. Comme je vous le disais, j’ai vécu un petit temps en squat et maintenant je suis dans une colocation avec 8 personnes. J’ai l’impression que ma vie n’a pas beaucoup de sens si je suis seule, même si je suis quelqu’un de solitaire de base. Même sur scène, c’est trop cool et ça me donne de la force d’être à deux avec SeniKaïd. Souvent on nous dit que ça fait du bien de nous voir à deux sur scène. 

LVP :  Quel rôle la musique joue-t-elle dans ton engagement politique et personnel ? 

cheapjewels : Pour moi, comme je l’ai mentionné plus haut, je n’ai pas envie de devenir une popstar. Ma pratique du rap et de la chanson n’a de sens que tant qu’elle me permet de prendre position et de visibiliser des questions importantes. J’ai envie d’utiliser ma position pour parler de sujets qui me touchent :  les accords Frontex, la situation irrégulière d’une amie qui attend depuis cinq ans d’être régularisée… Je ne sais pas si une chanson ou un album peuvent changer le monde mais il faut pouvoir continuer d’investir autant de médias que possible pour dénoncer ce qui se passe. La musique peut devenir un outil pour avoir de la visibilité et parler de choses importantes/vitales.

Faire du son me fait du bien et si avec ça je peux m’en servir pour aider d’une manière ou d’une autre (genre récolter des fonds pour mon pote Hatem, resté bloqué à Gaza avec sa famille), c’est quelque chose que je veux faire. Peut-être pour me sentir plus légitime ? Qui sait, mais je sais que ne pas le faire serait une erreur. C’est contradictoire, mais pour l’instant c’est comme ça que je pose les choses. Je viens du milieu militant qui parfois peut se révéler fort jugeant, mais à un moment donné, je me suis dit qu’il était inutile de se cacher… Je crois que c’est le piège dans lequel il ne faudrait pas tomber, à savoir celui de la pureté. Faire les choses bien, sans une tache, en ligne droite…

Je me pose beaucoup de questions quant à savoir comment dealer avec ça. Par exemple, quand tu rencontres quelqu’un·e qui a fait un truc de merde… Qu’est-ce que je dois faire ? C’est quoi la vraie radicalité ? Est-ce que c’est juste ne plus lui parler et haïr cette personne ? Ou alors lui dire, OK viens on s’assoit, on parle et tu m’expliques ton point de vue et les choses que tu as mises en place pour ne plus reproduire la même faute ? Là, j’ai l’impression qu’on sort de ce dilemme qui serait parler/nier, écouter/haïr…

LVP : Enfin, pour terminer, parlons un peu du futur. Est-ce qu’il y a déjà des choses qui commencent à se profiler ?

cheapjewels : Je pense à faire des clips. À côté de ça, en ce moment je travaille sur ma prochaine mixtape qui devrait sortir en novembre. Après, je rencontre aussi des nouveaux beatmakers, des gens avec qui j’aimerais travailler. J’aimerais bien que ce deuxième EP ou cette mixtape soit le lieu pour pouvoir tester plein de choses, faire des feat et mettre en avant les gens que j’aime. Parce que dans :c la fin du dream? il n’y a pas de feat, ce qui paradoxalement n’est pas très représentatif de la manière dont je travaille. Même si, comme je le disais plus haut, l’année dernière a été une année de solitude, je suis entourée de beaucoup de gens qui m’aident et me soutiennent dans mes élans.

LVP : Merci cheapjewels ! 


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