La Vague Parallèle au Horst 2025 : “Welcome to Horst City”
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Auteur·ice : Patrick Teixeira Oliveira
02/06/2025

La Vague Parallèle au Horst 2025 : “Welcome to Horst City”

Photo : Melissa Fauve

Du 1er au 3 mai dernier s’est tenu à Vilvoorde ce qui s’impose depuis 2014 comme un passage obligé pour toustes les amateur·ices de musique électronique et de clubbing. Nous parlons bien sûr de la 11e édition du Horst : Arts and Music Festival. Cette édition, encore une fois sold out, a tenu toutes ses promesses.

Photo : Melissa Fauve

Depuis le commencement, Horst a eu la volonté de repenser le festival de musique à travers la manière de montrer, d’écouter et de danser sur l’électro. C’est au cœur de l’Asiat Park, successivement centre de commandement technique de l’armée belge (1925), puis caserne militaire et zone de stockage, que se tient cet évènement. C’est en 2019 qu’il va être au cœur d’une vaste opération de réaménagement pour en faire un lieu socio-culturel avec son rachat par la commune de Vilvoorde.

Vous vous doutez bien qu’il est impossible de vous en faire un retour détaillé et même exhaustif… Avant de nous attarder un peu plus sur les différents aspects du festival, il est peut-être utile de rappeler qu’Horst se distingue d’autres festivals par le mélange qu’il propose entre une programmation musicale pointue, centrée sur la scène électronique underground (techno, house, ambient, etc.), des installations artistiques et scénographies immersives, souvent produites in situ par des artistes et architectes et par son ancrage local avec une forte attention portée à l’espace, à la durabilité et à l’expérience globale du public.

Photo : Melissa Fauve

Photo : Melissa Fauve

Le festival comme laboratoire

C’est à la suite d’un appel à projet qu’Horst a pris place dans le paysage culturel belge et international. La mission de l’équipe à l’origine du projet était de réinventer ce que pouvait être un festival en imaginant des infrastructures qui dépasseraient l’usage unique des trois jours et s’inscriraient dans le temps. C’est de cette façon que la scénographie a été pensée et prolonge la réflexion jusqu’à la production de véritables objets artistiques. Concept à la fois innovant et prometteur, c’est le futur que les organisateur·ices visent en voulant pérenniser le festival au sein de l’espace public et participer pleinement à la vie du quartier et à son redéploiement socio-économique.

Photo : Melissa Fauve

Photo : Melissa Fauve

La première chose qui nous a frappé·es en arrivant à HORST, c’est son aspect « total », « global », à la manière d’un parc d’attraction ou d’un jeux vidéo. En effet, tout y est pensé pour que chaque partie (visuelle et sonore) soit intégrée dans l’expérience. Quand tu viens à Horst, tu ne viens pas juste à un festival écouter tes artistes préféré·es… Tu viens pour vivre un moment dans lequel tu te retrouves immergé·e dans un autre univers sans vraiment savoir quand la transition a eu lieu. Avec plus de 115 artistes, le festival mélange de façon assez unique un spectre de proposition de musique électronique assez large. Ces propositions prennent place au milieu d’un écrin de verdure parsemée d’installations artistiques contemporaines et de scénographies architecturales toutes plus expérimentales les unes que les autres. Un paysage onirique entre organique et électronique.

Photo : Melissa Fauve

Photo : Melissa Fauve

Musique

Si la première envie de Horst c’est de créer un mélange des genres en favorisant des nouvelles relations entre musique électronique, architecture, arts visuels et performance, la line up nous a montré une telle diversité en termes de propositions que nous avons vite abandonné l’idée d’en faire un compte-rendu, ne serait-ce que pour éviter l’indigestion à la lecture. Au lieu de ça, nous avons préféré miser sur les photographies comme témoin. La vaste programmation est d’ailleurs une des forces du festival. À l’intérieur du « jeu », vous êtes les seul·es (avec d’autres) à décider du menu de votre expérience. Entre DVS1, ou des collectifs de Dj comme Generations in Sync (DJ Pete, Erik Jabari, Moritz Von Oswald) ou encore FOR ALL QUEENS! rassemblant Arakaza, MAKADSI, Rokia Bamba, Sadiq Bellamy & MC Zelda Fitzgerald, les propositions se multiplient et les choix à faire deviennent cornéliens.

Pendant les trois jours, celleux qui font une partie de la scène électronique actuelle (nationale et internationale) étaient au rendez-vous, avec quelques surprises… Car, si la qualité des invité·es influence l’image du festival, l’intention de départ n’a jamais été « de vendre des têtes d’affiche ». Car plus que de retrouver des noms connus, Horst mise sur la découverte. Certains noms reviennent et sont familiers, comme Eclair Fifi ou encore OMOLOKO et bien d’autres encore (voir ici). Forte des contraintes de départ que nous avons évoquées plus haut, la musique est une partie de l’expérience qui ne vaut que tant qu’elle est connectée aux autres composantes, qu’elles soient architecturales, artistiques, durables ou innovantes.

Photo : Melissa Fauve

C’est ainsi que DJ Marcelle investit la scène « Weaving Weeds » avec un mélange éclectique de sons accompagnés par une horde d’animaux de ferme dont les cris ponctuent le set. Mettant le feu aux poudres, elle est bientôt suivie par TaliaBle qui, fraîchement arrivée de Londres, se place au centre de la foule et rappe avec un plâtre sur la tête, avant d’inviter la foule à se joindre à elle dans un pogo. Le mélange des propositions de ces deux artistes reflète la capacité qu’ont eue les programmateur·ices à mélanger les styles afin de proposer des expériences variées.

Photo : Melissa Fauve

Art et performance

Aux côtés de la programmation musicale et des artistes qui nous ont fait danser, il y a toute une flopée d’artistes visuel·les et performeur·euses qui ont investi l’Asiat Park. Qu’elles soient de l’ordre de l’installation, de la sculpture ou de la performance, différentes pratiques sont venues habiter l’espace du festival, tantôt à proximité des scènes musicales, tantôt dans un espace dédié.

Dans le parc, “Lions” par Esven Weile Kjaer attirait la plupart de l’attention des visiteur·euses. Détournant l’image du lion comme animal dominant et représentant l’autorité, l’artiste le remplace par des rats – qu’il interprète comme un symbole queer, puisque ce sont des animaux dotés d’une grande vivacité d’esprit évoluant en marge.

Photo : Melissa Fauve

Photo : Melissa Fauve

Photo : Melissa Fauve

« Leporello » est une rampe de skateboard imaginé par Jean-Benoit Vetillard qui se situe juste à côté de « Trees as a Human Landscape » par Maen Florin et qui donnait à l’Asiat Park tout d’un coup des airs de cité antique. À côté des nombreuses propositions plastiques du festival, deux performances prenaient place dans la Rain Room à la même heure sur les trois jours. Une première pièce intitulée « The Pervert » imaginée par Eddie Peake, nous plongeait dans l’histoire d’une protagoniste qui nous racontait l’histoire de sa vie entre recherche de soi, découverte du monde et sexualisation.

Photo : Melissa Fauve

Photo : Melissa Fauve

Une deuxième performance intitulée « Tanin » de Hamed & Nathaniel invitait les personnes du public à une initiation autour de la danse et du corps. « Ici, il n’y a plus de sujet. Juste nous. Juste la danse… que la danse. » Chaque performance durait environ une heure et si au départ l’idée peut sembler incongrue, c’était au final des propositions qui s’inscrivaient parfaitement dans l’ADN du festival. Les propositions parlaient de sujets qui étaient directement intriqués dans des expériences festives. D’un côté, la performance de Peake a permis d’aborder les désirs au sein d’un espace où on a souvent tendance à penser qu’ils sont incontrôlables et bien venus sans y mettre de conscience. D’autre part, « Tanin » nous enjoignait à faire commun par ce qui nous réunissait, c’est-à-dire la musique, l’oxygène qui entre et qui sort d’un corps en mouvement.

Photo : Melissa Fauve

Architecture

 Enfin, la dernière dimension que nous souhaiterions aborder est celle de l’architecture. Le Horst ne se contente pas d’accueillir et de programmer de la musique électronique, il produit une expérience spatiale en collaboration avec des architectes, des collectifs de designers et des artistes visuel·les. Le festival investit des structures existantes (hangars, bunkers, entrepôts) qu’il transforme temporairement en espaces de fête, de sensations et de création.

Photo : Melissa Fauve

Chaque année, Horst Festival commande des scénographies architecturales spécifiques : des scènes, des espaces de repos, des ponts, des structures temporaires créées par des collectifs internationaux comme Piovenefabi (The Ring), Bruther (le Soleil Rouge), Leopold Banchini Architects (Moon Ra Pavillon), ou encore Traumnovelle. Ces installations hybrides, sculptures monumentales et architecture sociale, jouent sur les matières brutes, les volumes ouverts, les circulations poreuses en partant du terrain de l’Asiat Park. Cela nous amène à dire qu’Horst refuse de séparer la fête de son contenant : l’espace devient un médium aussi important que le son.

Photo : Melissa Fauve

Cette année, « Dark Skies » conçu par Banchini Bierens De Haan & DVST vient s’ajouter aux nombreuses scènes des éditions précédentes. Située en lisière du site, les systèmes sons et lumières sont intégrés au plafond de la structure, libérant ainsi le dancefloor de l’appareillage et distribuant le son de manière équivalente sur toute sa surface.

Photo : Melissa Fauve

Dans ce contexte, Horst agit comme un laboratoire architectural. Il ne s’agit plus seulement de créer un “décor” mais de produire un espace de vie pendant trois jours. Les installations sont souvent réutilisées, modulaires, parfois reconstruites ailleurs. La durabilité, l’usage du matériau local et l’ouverture à la lumière naturelle traduisent une attention à l’écologie du sensible. La fête électronique devient donc un dispositif spatial qui peut résister aux logiques marchandes du divertissement de masse, proposer des expériences esthétiques minoritaires, alternatives, non-institutionnelles et inventer des manières d’être ensemble qui échappent à la standardisation.

Photo : Melissa Fauve

Les rencontres

Vous l’aurez compris, le Horst : Arts and Music Festival arrive à mélanger tellement d’aspects qu’il s’impose définitivement parmi le paysage festivalier belge et international. La richesse des points de vue enrichit une vision globale qui se tient tant au niveau des propositions musicales que du mélange entre arts visuels, architecture et innovation dans la manière de construire les infrastructures. Mais comme toute proposition qui se maintient, ce qui fait aussi la réussite d’un moment comme celui-là, c’est évidemment les spectateur·ices.

Ces personnes se rencontrent, se retrouvent, dansent, flirtent à l’intérieur de cette atmosphère et se laissent emporter par l’ivresse dionysiaque. Les récits individuellement collectifs font sens en commun pour une période de 72 heures. Comment rendre compte de cet aspect-là, sinon que d’essayer de leur laisser la place ? On s’est demandé·es si on devait vous les raconter, comme il est coutume dans le format du live report ou alors, si au fil des sensations et des rencontres, nous ne devions demander à certain·es ce qu’iels ont pu en retenir…

Le dispositif a été le suivant : pendant toute la durée du Horst, au détour d’une scène, d’un moment de repos ou d’un échange en attendant la bouffe, nous avons demandé à des personnes si nous pouvions les prendre en photo. Si iels acceptaient, nous les contacterions quelques jours plus tard pour leur demander ce qu’iels en avaient retenu de leur expérience et de nous le retranscrire en quelques phrases. Nous avons pensé que ça serait la plus belle manière de clore ce live report.

Photo : p.tx

 Doriane : « J’ai passé trois jours au Horst Festival et c’était une vraie parenthèse. Trois jours, trois ambiances, trois énergies différentes. J’ai dansé, j’ai profité, j’ai adoré me balader entre les scènes sous un soleil vibrant. C’était beau, joyeux, libre. Juste ce qu’il me fallait »

Photo : p.tx

Sien & Piet : « Our Horst was about enjoying music, dancing, being among friends and new inspiring people, celebrating the sun, and above all domme dingen doen. (doing stupid things) !!!!! »

Photo : p.tx

Maud & Isa : ” Our first time Horst Gave us a special feeling of existing in this limited world. It brought a kind of cohesiveness that softened everyone and everything through not only music but also small details, bodies and nature. Words can’t almost  describe it I would say. The kind of community we felt was much needed and something we wish would be more normal in everyday life.” 

 

 

 

 

 

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