| Photo : Antinéa Esteban
Après Fatigue (2021) et Punchline (2023), deux EP aux tubes engagés qui font danser, Louisadonna délivre petit à petit des extraits de son futur album. Voici Vieille meuf, un titre aux mélodies entêtantes qu’on dédie à tous·tes les militant·es lassé·es de devoir sans cesse justifier une perfection qu’iels n’ont pas à atteindre. Nous sommes tous·tes de vieilles meufs et il n’y a rien de plus génial.
Être militant·e, c’est se prendre des foudres à longueur de journée. C’est se sentir quelques fois illégitime quand on réalise qu’on n’est peut-être pas suffisamment déconstruit·e ou informé·e. C’est aussi basculer sans arrêt entre “je n’arrêterai jamais de me battre” et “je n’ai plus de force”. Est-ce que ces états d’âme qui nous font souvent douter signifieraient qu’on milite mal ?
“Je milite mal, je pense à mal. Je suis qu’une vieille meuf.”
En plus d’être artiste, Louisadonna est psychologue auprès de femmes et enfants victimes de violence. Elle fait résonner son engagement à travers ses différentes casquettes. Et pourtant sous ces diverses appellations, elle nous confie dans ce tout nouveau single qu’elle n’est peut-être qu’après tout, une “vieille meuf qui pue du trou de balle.” Son franc-parler frappe comme un uppercut en pleine face : mais en fait, ne sommes-nous pas tous·tes dans le même cas ?
Louisadonna semble s’adresser à une personne qui tire sur elle, qui crache sur tout en se cachant derrière un écran. Alors même qu’elle se libère de son ressentiment, elle rappelle qu’elle est malgré tout loin d’être une militante parfaite. Ses paroles font écho à celles de la journaliste Chloé Thibaud : “je suis une mauvaise féministe et cela ne changera jamais puisque je le serai toujours trop pour certain·es et pas assez pour d’autres.” Elles interrogent la question de la pureté militante, cette idée qu’on devrait être politiquement et moralement irréprochable dans les milieux activistes, alors que l’imperfection est une caractéristique inéluctable de l’être humain.
Être une vieille meuf, finalement, c’est juste être un·e humain·e qui milite comme iel peut, qui ne marche pas sur une ligne droite, qui a parfois besoin de s’asseoir, de s’allonger, de tomber puis de se relever et de réapprendre. C’est aussi accepter de ne pas pouvoir – ni vouloir – se plier aux injonctions, ni de la femme parfaite d’un côté, ni de la féministe parfaite de l’autre. Et l’affirmer publiquement, c’est non seulement rendre la lutte féministe accessible, mais c’est aussi éviter les clivages au sein de milieux où il est plus que jamais nécessaire d’être solidaires. Alors soyons-en fier·es en dansant sur ce refrain de Louisadonna : “j’suis qu’une vieille meuf, vieille meuf”.
Mélomane en quête d’émergence, amoureuse du rap et des mélodies alternatives.