RAMO, génial Toucan de la jungle urbaine
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Auteur·ice : Charles Gallet
07/04/2018

RAMO, génial Toucan de la jungle urbaine

En 2018, les trottoirs ont remplacé l’herbe, les buildings ont remplacé les arbres. Nous sommes devenus des ombres urbaines, plus par obligation que par envie. On arpente les rues de Paris ou Bruxelles, aspiré par  la grisaille et la pollution qui nous entourent et nous minent le moral comme un vampire de béton qui nous aspire toute joie de vivre et qui lentement, mais surement, nous remodèle à son image.

Alors pour combattre le monstre de verre et d’acier,  on se perd dans des envies de verdure et d’autre part, on se dit que Tout Ira Bien. Comme un mantra, une idée qui germe dans notre tête comme une fleur apparaissant dans la craquelure du goudron. Pour nous accompagner dans ces réflexions, la musique de Ramó,  qui à la manière d’un Douanier Rousseau musical, ramène dans notre imaginaire la jungle et son bestiaire réel et fantasmé. Pour ça, il créée un genre musical qui lui est propre et qu’on pourrait nommer pop pastorale.

Rien de religieux là-dedans, juste un thème présent depuis l’antiquité et qui évoque l’harmonie originelle entre l’homme et la nature. Car il ne s’agit que de ça chez ce génial toucan de la jungle urbaine, offrir l’ailleurs par shoots de 3 minutes. Dans ce premier EP composé de 3 chansons et 1 remix , il nous offre l’évasion. Sa musique se fait aussi organique que visuelle, on ferme les yeux et on est assailli par la beauté du propos qui y est développé. On ferme les yeux et on s’en va, dans ce tourbillon, ce voyage, on croise Kirikou et Ponyo  aussi bien que Stromae et Cléa Vincent.

On y touche du doigt la douceur, la candeur, la mélancolie et la joie, on s’imprègne de ces sensations et de leur chaleur, on y puise les ressources nécessaires au combat et on ouvre à nouveau les yeux, régénéré. Et encore une fois, on se répète que Tout Ira Bien, ce n’est pas gagné d’avance, ça n’arrivera sans doute pas demain, mais y croire, croire en l’autre et en son intelligence, en sa solidarité, c’est déjà faire un grand pas en avant.

Pour la sortie de son EP, Ramó a eu la gentillesse de répondre à quelques questions qu’on se posait.

La Vague Parallèle : Il y a beaucoup de mystères autour de Ramo, peux-tu nous parler un peu de toi ?
Ramó : Je suis un citadin rêveur, qui troque à l’occasion sa tête de tous les jours contre un bec de toucan pour prendre la plume et écrire des histoires de retour à la nature.

LVP : Quelles sont tes influences ? J’ai beaucoup pensé à Miyazaki en t’écoutant.
R : Oui, c’est vrai qu’il y a des thèmes très proches ! Notamment dans Nausicaa La Vallée du Vent ou Princesse Mononoké. Il y est question de la place de l’homme dans son environnement, de forêts étranges, d’animaux fantasmés, et d’un équilibre qui doit être préservé : bien vu !

LVP: Ce rapport à la nature qui semble porter ton projet devient presque une attitude politique en ce moment. Qu’en penses-tu ?
R : C’est sûr que notre place dans l’environnement est un sujet important pour notre génération, il va falloir apprendre à dépasser l’idée de croissance illimitée et de nature “au service” de l’homme, pour atterrir et se replacer dans un écosystème. Trouver un équilibre, comme on le disait justement à la question précédente.

Et si avec Ramo je peux apporter ma pierre à cette prise de conscience, en créant, comme d’ailleurs beaucoup d’autres en ce moment (François & The Atlas Mountains, Rone, Fakear, Dominique A …), un imaginaire désirable autour de la nature, alors je serais heureux !

LVP :  Tes chansons semblent parfaites pour s’évader lors d’un trajet en métro, comme les envisages-tu ?
R : Au début j’imaginais les premiers morceaux comme des mises en musique des toiles du Douanier Rousseau, qui a été ma première rencontre artistique ; quand j’étais gamin, on nous emmenait souvent au musée des arts naïfs, que j’explorais au milieu de ces toiles pleines de couleurs et d’animaux, avec des perspectives étranges et des compositions très directes. C’est comme ça que j’ai commencé à décrire dans mes textes des forêts plantureuses et accueillantes, des hommes et des animaux mélangés, et puis une fois ce petit univers construit, il fallait imaginer comment l’auteur, citadin, allait pouvoir rejoindre cet endroit fantasmé : c’est la genèse de ce retour à la nature façon Ramo.

Et pour en revenir à ton image de métro, j’imagine très bien une rame s’égarer dans les souterrains de la RATP, ralentir, et emprunter un bout de tunnel qu’on pensait disparu et ressortir dans une clairière, avec tous les passagers à qui il aurait poussé des têtes d’oiseaux, de singes, de félins, et qui seraient heureux d’ouvrir la porte pour sortir et profiter du soleil qui perce à travers le feuillage des arbres qui surplombent. Ca fait envie, non ?

Quels sont tes coups de coeur récents ?
: Sortis récemment ou un peu moins, voici mes petits chouchous du moment :

Musique :

  • Le Naufragé de Voyou : un joli morceau dont le texte et la musique nous emmènent loin
  • Isabella d’Isaac Delusion : le morceau d’ouverture de l’album, ça prend le temps, c’est très beau
  • Idiot de James Holden, un chaman électronique (et en bonus : tout l’album James Holden & The Animal Spirit)
  • Si l’on ride de Muddy Monk avec Ichon, à écouter de nuit un peu fatigué, ça emporte

Vidéo :

  • Quitter La Ville de Rone et François & The Atlas Moutains par la Blogothèque : session magnifique à Roissy
  • Nausicaa La Vallée du Vent de Miyazaki

Visuel végétal :

  • La Robotte, Julien Colombier, Laure Delepinay, Saiman Chow

Livres :

  • Walden, de Henry David Thoreau 
  • Où Atterrir de Bruno Latour : un essai qui met en relation explosion des inégalités, mutation climatique et dérégulation

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