| Photo : Brooke Ashley Barone
On vous annonçait son grand retour il y a un mois : ce vendredi 14 mai, Nick Rattigan délivre son cinquième album studio Voyager, paru sur le label Secretly Canadian. On a donc sauté de joie à l’écoute de ce nouvel opus, mis notre casque sur les oreilles et on l’a écouté en boucle. Sans surprise, c’est un petit bijou.
Nous étions sans nouvelles de Current Joys depuis un long moment. Trois ans séparent la sortie de A Different Age et Voyager. Et c’est avec 16 titres que l’on retrouve Rattigan, de quoi servir plus que correctement les fans. Un disque sorti sur le label Secretly Canadian, nouvelle maison du musicien, laissant ainsi Danger Collective sur lequel il avait produit tous ses autres disques.
On le sait, l’essence de Current Joys, c’est d’abord des chansons pour les cœurs brisés : « Love/No I’m not in love/‘Cause you’re not Worth it/ You’re not Worth thinking of » nous chantait (voire criait)-il dans You broke my heart. Sur Voyager, les thèmes n’ont pas tellement changé puisqu’on retrouve des mots criards tels que “Miss my Valentine/I can’t breathe when you’re not mine” dans Breaking the Waves. Pour Amateur, un motif entêtant nous donne envie de prendre la route en s’époumonant sur ces seules et uniques lignes “You’re every song I love, can’t get away from”. La tension monte au fil de la chanson, avec une longue intro qui présente le leitmotiv. Une voix de femme faisant les harmoniques rejoint alors le chanteur, donnant davantage de poids et de forme, pour plus de frissons.
Déjà à l’époque où sortait A Different Age (2018), on sentait la rupture avec le kid lo-fi qu’il était. Comme quoi, l’album portait bien son nom. Le morceau Become the Warm Jets, extrait de ce dernier, apparaissait très épuré avec guitare, voix et batterie comme simple instrumentation. Dans cet album, les chansons se révélaient d’ailleurs souvent lentes, comme un recueil de complaintes.
Il faut savoir que la tête du groupe de rock sentimental Current Joys est un grand consommateur de cinéma. Cela se ressent notamment dans le clip accompagnant Amateur, aux couleurs incroyables. L’occasion de glisser un clin d’œil malicieux à l’univers lynchien. Et dirigé par Rattigan lui-même, s’il vous-plait ! Lui qui aura fait ses armes à New York en tant qu’assistant de prof dans l’industrie du cinéma et de la télévision avant de s’installer à Los Angeles y déversera toute son expertise.
Aujourd’hui, Nick a grandi. Et ça se ressent. Son rock fissuré qui nous faisait tant frissonner sur son Wild Heart de 2013 ou son Me Oh My Mirror un an plus tard n’est plus. On est bien loin du kid qui, du haut de ses vingt ans à l’époque et de sa voix chevrotante, chantait sa détresse pendant plus de sept minutes sur You Broke My Heart. Fini les enregistrements DIY, désormais le musicien opte pour des sessions d’enregistrement aux Stinson Beach Studios et une véritable instrumentation. Il n’hésite pas à sortir le trio à cordes et le piano, donnant ainsi un univers complètement différent avec plus consistance, tout au long du tracklisting. Voyager Pt 1 en est l’illustration parfaite, offrant à l’auditeur·rice près de trois minutes de musique dépouillée. Comme une sorte d’interlude au cœur même des seize pistes. L’approche d’écriture et d’enregistrement a indéniablement changé, il y a eu une évolution dans ce dernier opus même si la mélancolie et la nostalgie restent les maîtres mots. Pas déçu·es du voyage.
Je passe le plus clair de mon temps à faire des playlists. Je ride aussi les océans.
