Hollywood Bizarre, le boulevard pop de Hollydays
"
Auteur·ice : Charles Gallet
13/11/2018

Hollywood Bizarre, le boulevard pop de Hollydays

Des projets à la pelle. Cette année, la pop française explose de toute part. A chaque semaine son album qui tente de faire oublier celui de la semaine d’avant. Une opulence qui pourrait effrayer, tant la qualité n’est pas toujours au rendez-vous. Mais à qui sait chercher, chaque jour présente son trésor. Alors tels des chercheurs d’or, on plonge les mains et on utilise le tamis pour trouver la pépite qui nous fera vibrer. Aujourd’hui, c’est Hollydays qui vient frapper à notre porte avec un premier album d’une maturité assez folle. Entrez avec nous dans ce Hollywood Bizarre.

On l’a déjà dit, on le redira encore : ne jamais juger un album à sa pochette. Si on l’avait fait, aujourd’hui, on ne parlerait pas de l’album de Hollydays. On serait resté sur nos idées préconçues, sur nos stéréotypes et à travers cette pochette, on n’aurait vu qu’un banal de groupe de pop qui place son Hollywood Bizarre dans un cinéma pour une couverture un peu cheap. Et on aurait bien eu tort. Heureusement on est des gens plutôt curieux, alors on a fait fi de cette première impression et on a lancé l’écoute du premier album du duo. Et là, surprise.

Hollydays c’est Élise Preys et Sébastien Delage, c’est un nom qui rend hommage à Madonna tout en déformant légèrement le mot parce qu’on est libre de faire ce qu’on veut. C’est un nom qui sent les vacances et par conséquent la liberté, le besoin de s’émanciper d’un monde parfois trop sérieux. C’est aussi le groupe à l’origine de cet Hollywood Bizarre dont on vous parle en ce moment.

Le groupe existe depuis quatre ans et sort aujourd’hui son premier album après deux EP. Un gouffre monstrueux quand on voit des Angèle ou Eddy De Pretto qui sortent un premier album à peine six mois après leur premier single. Mais ces quatre ans n’auront pas été vain, au contraire, c’est le temps de maturation, la manière du groupe d’arriver à pouvoir produire ce qu’il veut et d’en être fier. Une manière de montrer que la musique n’est justement pas un hobby comme ils le disent dans Une Autre.

Cette peur de l’échec, ce besoin de se prendre et d’être pris au sérieux, ils les auront domptés dans les 13 chansons qui composent ce Hollywood Bizarre. Si le groupe avait repris avec bonheur certains titres des années 80, c’est bien loin de ses références que sa musique se dirige. On est plus dans la vague de “pop urbaine” celle qui parle à la jeunesse. On parle ici d’ombres et de lumières, de sexualités, de ses démons, de ses rêves et d’acceptation. Mais là où d’autres se vautrent dans une vulgarité de surface afin de passer pour des rebelles, la beauté de Hollydays tient dans des textes toujours travaillés, ou l’on joue avec les mots, où on les fait vivre sans jamais les maltraiter. Des textes volontairement travaillés donc, souvent remplis de spleen, mais qui ne sombrent jamais dans le noir complet, trouvant toujours une porte de sortie vers la lumière.

Ce souci du mot qui tape, du beau texte qui se veut accessible à tous et tend vers l’universel définit à lui seul la pop comme on l’aime. Mais Hollydays ne se refuse rien et  soigne aussi bien le fond que la forme. Il y a ces tubes déjà bien connus que sont L’Odeur Des Joints et le sublime Léo, qui parle de manière assez pudique de l’adultère. Il y a des titres qui diluent la mélancolie dans un apparat dansant, notamment Une Autre ou encore Folle et On A Déjà. Il y aussi les chansons où le rythme se pose, comme une descente ou un moment de calme la tempête : on fait baisser le rythme sur Sensible, Le Démon ou Deuxième Rang. Et puis il y a le triptyque de fin comme une apothéose : Sur Minuit (La Baie Noire), les genres se mélangent, le rythme se cale sur les pulsations de notre cœur et c’est vers l’orgie qu’on se dirige tranquillement comme un hommage à l’exceptionnel Shortbus (on vous conseille fortement le visionnage du film). Amor Amor parle de perte, avec toujours cette écriture toute en finesse, mais c’est fatalement Monsieur Papa qui nous achève. Le coming-out est souvent un sujet délicat, pas toujours traité de manière idéale. Ici, dans le fond comme dans la forme, tout colle, de la poésie des mots, du rythme aussi lancinant qu’il peut être martial, le morceau tout en pudeur se fait aussi beau que nécessaire pour ce Hollywood Bizarre.

On ne sait pas si Hollydays a jamais visité Hollywood mais avec son premier album, il colle parfaitement à cette fantasmagorie commune qui fait que l’on ne voit que ce qui brille, alors que la réalité se cache réellement dans les ombres. Hollywood Bizarre est à cette image, un objet pop facilement accessible mais qui cache ses trésors  dans les détails et dans lequel chaque mot est pesé, réfléchi, et où les ambiances sont aussi diverses que travaillées. On appelle ça une belle réussite.

 

Crédit Photo : Alex Gallisi et Jeremy Vissio

@ET-DC@eyJkeW5hbWljIjp0cnVlLCJjb250ZW50IjoiY3VzdG9tX21ldGFfY2hvaXNpcl9sYV9jb3VsZXVyX2RlX3NvdWxpZ25lbWVudCIsInNldHRpbmdzIjp7ImJlZm9yZSI6IiIsImFmdGVyIjoiIiwiZW5hYmxlX2h0bWwiOiJvZmYifX0=@