Le mode d’emploi du lâcher-prise vous est offert par Jungle avec Loving In Stereo
"
Auteur·ice : Caroline Bertolini
28/08/2021

Le mode d’emploi du lâcher-prise vous est offert par Jungle avec Loving In Stereo

Le duo britannique Jungle n’a qu’une seule ambition sur ce troisième album : vous faire danser sur l’amour. Trois ans après leur dernier projet, For Ever, Tom McFarland et Josh Lloyd-Watson ont mis la main à la pâte. On leur connaissait déjà une électro alternative aux limites de la disco, qui va bien plus loin cette fois-ci pour se dévoiler complètement disco et funk. Loving In Stereo revient aux styles de musique qui ont longtemps animé le monde, avec une touche Jungle mi-vintage mi-alternative. Il n’est plus question d’être timide, il est temps de se désinhiber et de suivre le mode d’emploi que le groupe a constitué pour nous. 

Un changement se remarque dans l’industrie musicale mondiale, un Big Bang qui aurait créé un monde parallèle. Les artistes y sont les mêmes, mais le mood complètement différent. Ce qui était triste est maintenant solaire ou dansant, ce qui était downtempo devient upbeat. On dirait que les événements de ces dernières années ont engendré une urgence de joie, de danse et d’être heureux de vivre puisque le monde tombe en ruine. Jungle n’est pas une exception. Alors que For Ever se voyait beaucoup plus calme et alternatif, faisant de Casio le son le plus dynamique du projet, Loving In Stereo fait des étincelles de chaque titre.

 

Dès le premier single en lice, Keep Moving avec son incroyable capacité à faire danser peu importe l’endroit et les circonstances, l’univers était plutôt explicite. Un des plus gros bangers de l’année, un peu différent des autres titres en compétition puisqu’il brille de sa légèreté et non de son intensité. Du côté vocal, c’est la symbiose totale avec des harmonies qu’on retrouvera tout au long du projet. Les Britanniques se lâchent et c’est contagieux. Toujours entourés de leur troupe de danseur·euses, J Lloyd lui-même et son cher ami Charlie Di Placido réalisent toujours les clips les plus grandioses. Un shoutout aux incroyables chorégraphies signées Nathaniel Williams & Cece Nama qui nous font rêver d’être des divinités de la danse.

Des déhanchés ? En veux-tu en voilà. Le point commun des singles comme Keep Moving, Talk About It, All Of The Time c’est la furieuse envie de faire partie de cette troupe-chorale qui nous invite à la rejoindre dans toute son émancipation. Ça respire la joie de vivre et on veut en être. Plus question de se lamenter sur les relations amoureuses, maintenant on se laisse emporter. Dès l’intro Dry Your Tears, le groupe nous dit qu’il est temps de laisser le drama de côté et la toxicité, de s’ouvrir à un amour simple et joyeux – d’aller de l’avant en somme.

 

Si ces derniers titres ne surprennent pas une fois mis côte à côte, c’est le single Truth qui se présente comme élément perturbateur. Par son influence rock remarquable – on peut réellement entendre les guitares – il emmène le groove là où on ne l’attendait point. On secoue des cheveux plutôt que de bouger des hanches. Selon les artistes eux-mêmes, c’est le titre qui s’apparente le plus à un The Strokes de Is This It (qui fête d’ailleurs ses 20 ans) avec l’esprit dAngles (les haters vont hater) et la bonne humeur de Jungle. C’est aussi ce qui les ramène à leurs influences et leur amitié qui a, bien sûr, été teintée de ce groupe iconique – la légende dit que les meilleures amitiés commencent avec les Strokes.

Lifting You nous emmène sur un date en dancing américain muni·es de patins à roulettes. Les jambes se croisent autant que les regards ambigus. “Lift your body up. Naturally we fall. Give your body love. I won’t let you go. It’s all coming on.” Si efficace qu’elle ne rend personne indifférent·e. En même temps, comment résister à cette voix qu’on a l’habitude d’entendre en falsetto et qui nous ramène désormais sur la douceur du souffle. On imagine bien les deux camarades en train de composer et rire aux éclats, encore plus sur What D’You Know About Me?. Vous avez dit “plus de basse” ? Vous pouvez donc retourner manger votre haine parce que les Anglais savent comment doser ce qu’il faut au bon moment pour nous garder sur la piste, et les lignes de basse sur cet album n’y sont définitivement pas pour rien.

Les paroles deviennent alors un ornement sur de très bonnes pièces de production qui se veulent chargées au niveau du mix. Il est vrai que Jungle ne fait pas des masterpieces en termes d’écriture, mais ici, c’est le feeling qui prime. On dit des choses simples (basiques) et on décomplexe les relations humaines déjà bien assez (trop) intriquées. Des phrases courtes, des chansons concises et efficaces – tout y semble évident. C’est tout ce qu’on attend d’un projet avec une telle intention dansante. On y retrouve d’ailleurs plus d’instruments que d’habitude, pour un feeling plus organique. Saxophone, trompette, flûte, percussions en tout genre, etc.

 

De quoi calmer le cœur qui bat en chamade ? Le doux – oui j’ai dit doux – Goodbye My Love porté par la voix soul de Priya Ragu nous calme net. Le seul featuring qui vaut la peine d’être sur un disque pareil (désolé Bas). Néanmoins, pas question de s’éloigner du dancefloor, on descend en tempo et on augmente en sensualité. La pointe de mélancolie qui en résulte est très appréciée. On peut parler d’une vraie surprise tombant comme un souffle émouvant dans un album jovial et léger.

On revient à une disco funk entraînante avec Bonnie Hill, faisant référence à l’endroit à Los Angeles où a été écrite la chanson. C’est presque une chorale de gospel qu’on retrouve ici. Elle se voit généreuse en harmonies omniprésentes, sans rien nous demander en retour. Au niveau de la production, on vous décrira seulement la façon dont notre visage est figé à l’écoute de ce titre : tête légèrement penchée sur la droite, sourcils légèrement froncés, un œil à moitié fermé, une moue de type “duckface légèrement ouverte” qui manque de sortir l’onomatopée “ouh”, un doigt à peine levé. Enfin, on ne peut s’empêcher de bouger de la tête comme une poule dans un poulailler.

Bref, ils s’amusent. On s’amuse. On a envie de retourner à l’époque où les clubs mainstream ne passaient pas les titres de kermesses des années 2000 que tout le monde a entendus 1000 fois. L’époque où entendre du Jungle aurait été reçu comme une aubaine dans sa soirée pour danser jusqu’au bout de la nuit. C’est un peu ça l’expérience de cet album : le lâcher-prise corps et âme à la joie du moment présent. Arrêter de réfléchir et s’abandonner au rythme de chansons positives et romantiques avec des dance moves toujours plus extravagants. Et puis, parce qu’aimer en stéréo c’est bien mieux qu’en mono, on vous laisse suivre l’exemple de Jungle.

@ET-DC@eyJkeW5hbWljIjp0cnVlLCJjb250ZW50IjoiY3VzdG9tX21ldGFfY2hvaXNpcl9sYV9jb3VsZXVyX2RlX3NvdWxpZ25lbWVudCIsInNldHRpbmdzIjp7ImJlZm9yZSI6IiIsImFmdGVyIjoiIiwiZW5hYmxlX2h0bWwiOiJvZmYifX0=@