Deux ans après la sortie de son dernier album Like a Baby, Jerry Paper signe un retour haut en couleur avec ce nouvel album Abracadabra. Connu pour sa pop expérimentale, Jerry Paper laisse cette fois-ci plus de place à l’authenticité. Ne s’éloignant jamais bien loin de sa passion pour la pop, on y retrouve les sonorités suaves qui font presque partie de son ADN. Plongeons au cœur du monde cosmique de Jerry Paper et de son nouvel album Abracadabra (PIAS), qu’on adore déjà.
Jerry Paper est l’alter ego un peu fou de Lucas Nathan, jeune californien à la pop interdimensionnelle et expérimentale. De ses cassettes solo au clavier début 2010 à ses albums plus fournis musicalement, Jerry Paper est comme un génie créatif, toujours à la recherche de nouvelles sonorités. Comparable à un groupe à lui seul, Nathan a l’énergie de 5 personnes en une. Plus les années passent, plus ses projets sont ambitieux et ont de la substance. Avec ce nouveau chapitre qu’est Abracadabra, Nathan se plonge en pleine introspection débordant d’absurdité. Il y explore la relation entre narrativité et musicalité avec précision. Une réussite pour l’artiste, qui nous surprend avec un style bien à lui, qui ne laisse personne de marbre.
C’est en 2019, après sa dernière tournée, que Nathan met de côté ses robes à fleurs pour se plonger à cœur ouvert dans la création du prochain album. Il retourne ainsi à Toronto, villégiature préférée de l’artiste quand il s’agit d’enregistrer, pour se remettre au travail. Alors qu’il avait l’habitude d’être entouré de quelques autres artistes lors de ses sessions, comme BADBADNOTGOOD, Nathan préférait cette fois-ci se tourner vers la solitude.
Réalisé à un moment de sa vie où Nathan redécouvrait le pouvoir des mots et des histoires qui pouvaient en découler, Abracadabra en est l’œuvre finale. Étymologiquement, Abracadabra signifie « Cela sera créé en mes mots », et c’est bien cela que Nathan a cherché. Chacun des 13 titres de l’album joue sur la signification du langage et la façon dont on raconte les choses. Nathan arrive à donner du sens à ce qu’il n’arrivait pas à expliquer auparavant. Ce mélange de mots et de musicalité permet de donner naissance à ce qui sera le nouveau bijou de l’artiste.
Comparé à ses anciens albums, Abracadabra est plus épuré, plus homogène musicalement. Son goût pour le synthé pop est toujours aussi joliment présent, et heureusement car on n’en lasse pas ! Mais cette fois-ci, des riffs de guitare plus funky rajoutent une note ensoleillée aux différentes expériences de vie de Nathan. Des percussions viennent, elles aussi, rajouter leur touche de couleur à un album qui s’apparente à une véritable histoire musicale. Avec des sonorités très jazzy présentes tout au long de l’album, comme un cadre esthétique prédéfini, Nathan nous sert sur un plateau un merveilleux mélange, créant une pop avant-garde éblouissante.
Avec des titres comme Memorial Highway, très chargé émotionnellement de par son thème qu’est l’existence que les gens gardent de nous après notre mort, en passant par des plus particuliers comme Puppeteer qui nous parle d’un alien surveillé par une présence mystérieuse, Abracadabra est un album sincère, se rapprochant par moments du bizarre, tout en gardant cette part de réalité. Orné d’un visuel tout aussi décalé, collant au personnage de cette histoire qu’est Abracadabra, l’univers dans lequel nous plonge l’artiste arrive à nous donner le sourire, à nous faire bouger la tête, et ce même si la mélancolie de Nathan est présente tout au long de ce nouvel opus magnifiquement ficelé.
Toujours au premier rang d’un concert par amour mais surtout parce que je suis le plus petit. Je fais de la mélancolie mon principal outil.