Savages – Adore Life : louange obscure à la vie
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Auteur·ice : Mathias Bourgonjon
22/01/2016

Savages – Adore Life : louange obscure à la vie

Avec comme instruments principaux une rage aux entrailles sans pareille et une patte musicale des plus reconnaissables, le quatuor féminin londonien guidé par la française Jehnny Beth donne suite à son premier opus Silence Yourself sorti en 2013 avec un album qui, tout en gardant des codes musicaux identiques, emmène Savages vers un autre niveau de complétude. Là où il y aurait été possible d’émettre une critique sur leur travail précédent au niveau de la répétition de structures peut-être trop similaires dans chaque morceau, Adore Life souffle un vent nouveau en variant les intensités, en alternant les rythmes et en créant des ambiances aussi différents qu’elles participent au tableau global de l’oeuvre. Ce qui est le plus remarquable sur ce nouvel opus de Savages, c’est que, malgré cette férocité dans la composition et l’interprétation, on sent que le groupe a voulu exprimer son amour profond de la vie (d’où le titre…) et surtout de s’en faire le porte-étendard. Une volonté qui transparaît clairement dans ce décaptyque.

Avant la sortie officielle du long format, il nous avait déjà été donné de découvrir trois singles : The Answer, T.I.W.Y.G. et Adore. Première plage de l’album et premier single en date tiré de celui-ci, The Answer est probablement la chanson de Savages dont l’atmosphère sonore, au niveau de la hargne vocale, la frénésie des percussions et l’irrévérence du couple mélodique basse-guitare, semble le plus correspondre à l’univers que le quatuor nous avait présenté dans son premier LP. Sur T.I.W.Y.G. (pour les férus d’acronyme, cela correspond à « This Is What You Get »), le chaos créé par le groupe, bien que brillamment contrôlé, nous explose à la figure le long d’un petit trois minutes où toute la violence et la passion des quatre âmes édifiantes se mêlent pour le pénultième titre de Adore Life. Sur le titre quasi-éponyme de cet opus, Adore, une facette nouvelle des Londoniennes apparaît à la surface. En instaurant une tension évoluant très subtilement dans une ballade en accords mineurs et sous-tendue par une ligne de basse obstinée, Jehnny Beth exprime une pensée épicurienne avec un chant stable et assumé.

Bien entendu, loin de nous l’idée d’omettre les autres morceaux qui constituent Adore Life. Des titres comme Evil ou encore Sad Person mettent en exergue la capacité du groupe d’également proposer, en respectant un genre post-punk propre à la formation, des formats plus classiques avec un refrain, un couplet et quelques gimmicks mélodiques. Avec Slowing Down The World, le groupe élabore (comme avec Strife, sur l’album précédent) un développement lourd dans l’arrangement rythmique mais qui semble tout de même fort aérien dû aux envolées de charleston à contre-temps et à une basse au treble prononcé. Dans cette deuxième partie de l’opus, Savages laisse libre cours à son énergie chaotique sur les titres I Need Something New, When In Love et Surrender, trois hymnes viscéraux qui confirment et affirment, encore une fois, le potentiel du band. C’est alors Mechanics qui clôture Adore Life avec une sérénade qui clame la volonté de comprendre le fonctionnement intrinsèque de l’amour. Cet amour, on l’a touché du doigt d’une manière magnifiquement sombre avec cet album.

Leur concert du 2 mars au Botanique est déjà sold out mais il vous suffira de vous déplacer sur Dijon, Lyon, Bordeaux ou Paris autour de cette date pour voir les Savages vous cracher leur post-punk dévastateur au visage. Plus de dates sur le site du groupe.

Photos © TIM

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