TO FEEL ALIVE : les quatre saisons libidineuses et sentimentales de Kali Uchis
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Auteur·ice : Flavio Sillitti
02/05/2020

TO FEEL ALIVE : les quatre saisons libidineuses et sentimentales de Kali Uchis

Elle est de retour, plus sulfureuse et provocatrice que jamais. Deux adjectifs qui collent à la peau de Karly-Marina Loaiza, la nouvelle reine de la lascivité musicale qui, à chaque sortie, ne manque pas d’élever la température. Et ce n’est pas ce mini-EP qui dira le contraire. Un projet inopiné qui prouve que Kali Uchis n’a pas chômé depuis son délicieux Isolation qui marquait, deux ans plus tôt, les débuts de la jeune visionnaire colombienne. À travers quatre démos dépoussiérées et magnifiées, Uchis ouvre la voie d’une nouvelle ère, à l’aube d’un second album attendu de pied ferme. Quatre pépites pour se sentir vivre, se sentir vivant·e, dans un élan de fragilité et de sexualité décomplexées. 

Pour situer l’origine des deux premiers morceaux de l’EP, on vous invite à un retour en arrière de plus de sept ans, au cœur de la conception de Por Vidale premier projet impeccable de Kali Uchis. Les influences de ce premier opus sont ici alliées à la fibre plus technique et concise d’IsolationUne fusion que dépeint l’artwork brillant et affolant de la jeune peintre polonaise Oh de Laval, comme le décrivait subtilement Uchis :

L’artwork représente mon ère Isolation qui mange la ch*tte de mon ère Por Vida

Si l’EP Por Vida ne paraîtra qu’en 2015, une vidéo promotionnelle du disque avait déjà été partagée en 2013, introduisant l’esthétique si particulière de ce phénomène en devenir. Un teaser portant le nom de Honey Baby et qui contenait un trio de morceaux mystérieux, ne figurant sur aucun des précédents projets de la chanteuse : Honey BabyRich et Pablo Escobar. On relève ainsi qu’honey baby(SPOILED!) est un remake du premier snippet présent sur la fameuse vidéo. Si les influences du sample du mythique Gypsy Woman (She’s Homeless) étaient clairement identifiables sur la première version, ce rework vient découdre l’instru pour l’agrémenter d’une constellation de notes célestes et légères. Le résultat offre une oeuvre dreamy qui s’accorde à l’esprit sentimental et fleur bleue du morceau.

Pour angel, l’artiste reprend les lyrics de Pablo Escobar et module quelque peu le background rythmique pour nous offrir une douceur efficace, jouant sur l’allégorie de substances illicites qu’elle lie aux sentiments amoureux. Une métaphore malicieuse dont les multiples références à double sens ne vont pas sans rappeler le So High de Doja Cat, à l’époque où TikTok n’avait pas encore fait d’elle une superstar. “I’m your little angel, baby boy, we’re going biblical” susurre Uchis, ramenant sa plume aiguisée à l’humour réfléchi et cristallisant les talents d’écriture d’une autrice-compositrice affirmée. On regrettera de ne pas retrouver le dernier titre de la triade, Rich, qu’il nous tardait de redécouvrir. Mais rassurez-vous, on vous a déniché une version longue de ce précieux bijou, en attendant la version studio qu’il mérite.

Sur i want war (BUT I NEED PEACE), notre coup de cœur de la collection, Uchis nous livre une balade brûlante, balancée entre des envies passionnelles et une houle relationnelle toxique.“I just want a kiss on my neck bone. I just want some head and a few wet kisses. […] Used up your chances, held my heart for ransom, and now a new man treat me better than you did. Get my pussy wetter than you did. You know it could have been you and me.” Le message est clair : Loaiza n’a plus le temps pour les prises de tête, que de l’amour et de la passion. Une philosophie à adopter aussitôt le confinement levé, promis.

Finalement, le titre éponyme TO FEEL ALIVE pose un texte touchant, puisant dans les différents combats de Kali Uchis pour rester fidèle à elle-même, ne pas se laisser étouffer par la cruauté et les paillettes du showbiz. Sur une ritournelle épurée de contrebasse, elle délivre une fragilité touchante, mâtinée d’une détermination sans limite, qui l’a hissée aujourd’hui au rang d’artiste reconnue. “Some people get their kicks just steppin’ on your dreams, I know it. Kick me while I’m down and still, I get up.” chante-t-elle, plus badass que jamais.

Guess I’m a misfit, baby, they won’t ever love me
I’m not the perfect pretty girl up on the magazine
With no opinions, so trust my all and wave

Si Isolation s’appuyait sur une esthétique vintage et nostalgique, ce nouvel EP emprunte plutôt la voie RnB nuancée entre rythmes chaloupés et mélancolie nébuleuse. L’occasion pour la chanteuse de nous exprimer ses urgences et ses désirs ainsi que d’exhiber ses failles et ses lubies, sur des rythmes envoûtants qui nous gagnent dès la première écoute. TO FEEL ALIVE, de ses majuscules criardes, nous clame les crises existentielles de l’artiste, mêlées à des passions charnelles inhérentes et une sensibilité touchante. Un projet qui n’a rien de vraiment révolutionnaire : Kali Uchis nous livre du Kali Uchis. Mais c’est finalement tout ce qu’il nous fallait, du moins pour combler l’attente d’un second album.


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