Si seulement le monde était aussi beau qu’un concert d’Alice Phoebe Lou
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Auteur·ice : Caroline Bertolini
04/12/2023

Si seulement le monde était aussi beau qu’un concert d’Alice Phoebe Lou

Il est difficile de trouver les mots justes pour exprimer ce que nous avons ressenti au concert d’Alice Phoebe Lou à la Madeleine, en ce 26 novembre dernier. Tous les mots semblent faux, et pourtant, nous étions présent·es, et peut-être vous aussi. Pour celles et ceux qui n’ont pu y assister, nous pouvons déjà vous dire qu’il figurera dans les meilleurs concerts qu’il nous a été donné de voir cette année. C’était comme comprendre pourquoi nous étions là, devant cette personne que nous admirons, comme des âmes en peine, en soif de beauté et de poésie.

Avant toute description, il nous faudra vous parler de la première partie de ce show, en le groupe de Loving. Nous avions pu assister à leur concert en 2019 au Witloof bar du Botanique, un concert très intimiste vu son cadre. Malheureusement, il avait raté son occasion de nous toucher en plein coeur autant que les versions studio. Ici, Loving se produisait dans une salle bien plus grande, avec un public tout autant agrandi, un avancement de taille depuis leur dernier passage. Seulement, cette fois, la démonstration des cinq musiciens a eu l’effet escompté : une salle presque comble pendue à leurs instruments et à leurs mots.

Néanmoins, nous étions quelques peu déçu·es de ne pas pouvoir profiter d’un échantillon plus grand du début de leur discographie, qui aura tant soigné les cœurs brisés à sa sortie. Visions et Only She Knows étaient donc les seules particules qui s’en sont détachées et sont arrivées à nos oreilles en cette soirée automnale. Il n’a d’ailleurs pas fallu dix minutes après la fin de ce concert pour observer un resserrement des rangs dans le public, annonçant l’arrivée imminente d’Alice Phoebe Lou.

La densité d’êtres humains dans le public concurrençait presque avec un concert de tête d’affiche de festival un dimanche soir côté main stage. Dès son entrée sur scène, un sentiment de soulagement généralisé habitait la salle et c’est alors qu’un  phénomène inhabituel s’est opéré à La Madeleine, on aurait dit que le public excité s’était apaisé et dispersé au fur et à mesure du concert. Vous comprenez, il fallait pouvoir garder son espace personnel pour pouvoir ressentir chaque note qui nous était offerte de façon presque sacrée.

Tout d’abord accompagnée de sa guitare, Alice nous présente son âme angélique, accompagnée de sa guitare. “Is it safe, to go outside, I’ve been hiding for quite some time”, ou la plus belle bribe d’ouverture de concert. Il nous faudra donc impérativement vous conter cette histoire en lyrics, et en images pour vous laisser vous immerger et ressentir le dixième de ce que nous avons vécu.

Les singles que nous avons écoutés en boucle depuis leur sortie font leur magistrale entrée. Dusk, certainement une des plus belles chansons de la décennie avec son ton grave, ses notes de piano importées du jazz et sa production taquine, ou encore Open My Door, qui nous fait ramasser notre amour propre que nous avions délaissé ;

So, I took my bones and I called them my own
And I found a place inside that’s safe for me
And now I wander the world alone but alive
Smiling on the inside

Mais notre moment préféré, très certainement à vie, ce sera l’écoute de Only When I, qui nous donne toujours plus envie de nous arracher le cœur à chaque nouvelle douce confrontation. Que les amours déchues puissent l’écouter avec une nostalgie déchirante, telle que nous en avons fait l’expérience ce soir-là. La voix d’Alice Phoebe Lou, comme un cri du cœur qui retentit jusqu’au bout du monde, ses yeux fermés et bras qui tanguent au rythme de ses paroles, nous ont figé·es sur place. Nous en avons encore des frissons, rien qu’à l’écriture de ces lignes.

Sometimes it feels like I could give it all up to be held by you
But that’s not all the time, no, not all the time

Only when I can’t breathe
Only when I wanna believe
Only when it’s late at night
Only when I don’t feel right
Only when I touch my body
Only when I’m feeling naughty
Only when you’re far away, far away, far away

Glow, puis Shelter, comme retour dans la partie “mélancolie à demi-sourire”, carrément pas pour nous déplaire car nous essuyons encore les larmes intérieures de ce début de concert si intense. Une fois la scène vidée de tous musiciens, nous avons aussi droit à une version piano particulière en compagnie de Alice et My Girl, dernière chanson de son dernier album.

It’s a man’s world, my girl, my girl, my girl
We gotta poke it, haunt it, stir it, and flaunt it
As the dirt falls from the mouths of hounds
That bite as you fight for your body to be nobody’s but yours
Your body’s, nobody’s but yours
Sharpen your claws, my girl
Learn to love your flaws, my girl

Don’t listen to the laws that make you feel small
You’re a waterfall and we fall, and we fall, and we fall
But I’d rather fall than never try at all
And take with you the bravest moves of soothsayers
Bridge makers, world shakers ’cause I’m shaking

Pour ajouter au demi-sourire dont nous parlions à l’instant, nous sommes témoins de moments de complicité, ci et là, entre Alice Phoebe Lou et ses musiciens, sous des transitions jazz en fond sonore de ses petits discours, qui rendent évidente la bonté infinie de l’artiste. Les têtes bougent de gauche à droite puis de droite à gauche et la salle est si calme, si belle, portée par une poésie intense. Presque spirituelle. Les deux chansons qui suivent marquent alors la transition entre ces moments de jazz délicats et les plus dynamiques qui sont très certainement très attendus par le public, et ce, depuis quelques 15 chansons.

S’ensuit alors la fin du concert, entre énervement, incantations et joie. À commencer par Underworld, clairement sous-apprécié par la communauté qui suit le projet, et ensuite Lose My Head qui porte très bien son titre puisque l’audience entière commence à sauter et balancer de la tête. Avant que ces mêmes têtes finissent par accompagner les mouvements de rebonds (presque drôles) des corps présents à La Madeleine. On ne peut s’empêcher de sourire à pleines dents comme si on nous avait hypnotisé·es et demandé de sourire toujours plus fort, pour accompagner Witches.

I’m one of those witches, babe
I’m one of those witches, babe
Just don’t try to save me, ’cause
I don’t wanna be saved

Retour à une légère douceur rythmée, avec une des meilleures lignes de basse de la soirée. Des sauts, des sourires et plein, plein, vraiment plein de bienveillance. Nous savons exactement pourquoi nous sommes là, en cet instant, et nous profitons de chaque note, chaque eye contact et observation du public. Si Alice Phoebe Lou pouvait rendre le monde meilleur avec sa musique de façon permanente, on la couronnerait sur le champ. Tyrannie de la douceur incoming.


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