Les clips de la semaine #85
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Auteur·ice : Rédaction
16/08/2020

Les clips de la semaine #85

Les clips de la semaine, c’est votre rendez-vous du dimanche. Pour faire passer votre gueule de bois et pour adoucir votre week-end, on vous sélectionne les clips qui ont fait l’actu de ces derniers jours. Et quelle semaine ! Les clips de la semaine épisode 85, c’est maintenant !

Dorian Electra – Gentleman / M’Lady

Si vous n’êtes pas encore à jour avec Dorian Electra, remédiez-y au plus vite ! Expérimentaliste de la pop avant-gardiste et surprenante, véritable mystère aux styles affolants et à l’identité artistique fascinante, iel (Dorian s’identifie comme non-binaire) fait partie de cette nouvelle vague d’artistes hyperpop. Un néo-genre en plein boom qui repousse sans cesse les standards de l’industrie : esthétique hyper acidulée, voix autotunées et surpitchées, instrumentals distordus déroutants et hautement expérimentaux, etc. SOPHIE, 100 gecs (et son money machine, considéré par beaucoup comme le manifeste hyperpop) ou Charli XCX dans la sphère plus mainstream : les artistes issu·es de ce mouvement continuent de prendre du terrain et en profitent pour mettre en lumière des thématiques importantes, liées notamment à la fluidité sexuelle ou la non-binarité. Parmi elleux, l’Américain Dorian Electra ne cesse d’impressionner par son charisme indéniable et ses propositions audacieuses, acclamées l’an passé sur l’extravagant Flamboyant, un album qui – son nom l’indique – célébrait la flamboyance kitsch de la pop sans vergogne aucune. Avec Gentleman / M’Lady, l’artiste vient tacler la masculinité toxique avec un visuel ironisant tant le patriarcat nauséabond de nos sociétés que la misogynie omniprésente de notre époque. Il rend également hommage au phénomène TikTok, à la culture gaming et combat l’usage du plastique façon Ninja Fruit. Oui, tout ça !

Jorja Smith – By Any Means

“By any means, I will fight.” Jorja Smith revient cette semaine, plus engagée que jamais. Dans la lumière du soulèvement social qu’ont engendré les manifestations #Blacklivesmatter partout dans le monde, Smith compte bien faire avancer le mouvement davantage et décide d’y apporter sa contribution avec un nouveau single visant à sensibiliser aux problématiques liées au racisme. Pas étonnant de la part de la Britannique dont les élans d’activisme sont déjà multiples : Blue Lights en 2016 dénonçait ainsi les violences policières tandis que le clip de Rose Rouge rassemblait en juillet dernier des centaines d’archives vidéos des manifestations de ces derniers mois. À la source de ce morceau bercé par des mélodies smooth et contrasté par le flow maîtrisé de la chanteuse, un constat : “What can I do to keep this conversation going? It’s not just a post on social media, it’s life.” Derrière la caméra, Otis Dominique et Ellington Hammond ont ainsi dressé un portrait de familles britanniques issues d’immigration, dans des séquences pleines d’authenticité. Le morceau paraîtra sur la compilation Reprise de Roc Nation, une collection de compositions d’artistes varié·es abordant bon nombre d’injustices sociales actuelles.

Kali Uchis – Aquí Yo Mando (feat. Rico Nasty)

Issu de son second album à venir (faisant suite à son excellent Isolationet trois mois seulement après son EP de confinement TO FEEL ALIVE, l’artiste colombiano-américaine la plus productive du moment balance Aquí Yo Mando, en équipe avec la rappeuse provocatrice Rico Nasty. Ode hautement féministe, joyau de bilinguisme hispano-anglophone, le morceau peut compter tant sur la volupté vocale d’Uchis que sur le flow torride de Nasty qui lui répond généreusement dans un couplet brûlant. Kali pose alors sur les solides bases trap du titre ses lignes en espagnol, ouvrant la voie à son prochain disque certifié 100% hispanique. S’appropriant une mode futuriste à la pointe de l’extravagance, les deux trouble-fêtes se paient des allures iconiques pour interpréter un duo de femmes fatales tueuses de bad cops (aux nez de cochon) dans des plans mi-glam mi-trash signés Philippa Price

IDLES – MODEL VILLAGE

Les prophètes de l’Apocalypse sont de retour ! Deux ans après la sortie du remarqué Joy as an Act of Resistance, les bruyants Britanniques se remettent en selle avec le clip de MODEL VILLAGE, quatrième extrait de leur prochain album, Ultra Mono, qui sortira le 25 septembre prochain. Avec sa hargne habituelle, le groupe emmené par Joe Talbot dépeint la vie étouffante d’un village anglais renfermé sur lui-même à la manière d’un bocal à poissons. Aux manettes du clip, on retrouve les extraordinaires frères Gondry pour ce qui restera sans doute l’une des collaborations les plus excitantes de l’été.

Orville Peck, Shania Twain – Legends Never Die

Country music is ALIVE. Première étape : prenez Orville Peck, la nouvelle sensation country au masque à franges tout droit issue du Canada. Deuxième étape : ajoutez Shania Twain, icône historique de la musique country. Vous obtiendrez alors ce suprême duo canadien. Legends Never Die est la chanson country taillée pour les stades (et vraisemblablement la plus orientée pop du tout nouvel EP de Peck, Show Pony), et le duo nous semble a much better duet than Lady Gaga et Bradley Cooper, que cela vous plaise ou non. Il suffit d’apprécier le regard de Peck lorsque Queen Shania lui vole majestueusement l’intro du morceau. Legends Never Die constitue un clin d’œil aux fans LGBTQ+ des deux artistes : « you got nothing if you ain’t got pride » scandent ensemble leur voix devant un parterre de voitures. Ambiance Tennessee et drive-in en plein air pour ce clip qui met en scène, entre autres, Miss Jaida Essence Hall, la tenante du titre de RuPaul’s Drag Race, et Miss Toto. La présence de ces figures fait la part belle à la représentation queer, et dans la musique country – souvent associée au conservatisme américain  – c’est assez rare pour être souligné.

Men I Trust – Pierre

Les canadiens de Men I Trust clippent enfin leur magnifique single Pierre, après la sortie de Dorian et Pines – filmés par le groupe de façon totalement autonome. Cette fois-ci, le groupe nous ravit d’une vidéo tournée à la pellicule 16mm pour le morceau le plus doux qu’il nous ait été donné d’entendre. Emma Proulx nous chante sa ballade avec sa guitare en pleine nature, accompagnée de Jessy Caron à la basse et Dragos Chiriac à la flûte. Ici, Men I Trust a décidé de ne pas raconter une histoire dans son visuel mais de juste jouer la chanson à la façon d’une session live à laquelle nous rêverions d’assister. “Pierre, You’re my friend There’s a place you can call home,” Emma nous susurre à l’oreille. Une délicatesse incomparable. L’esprit du groupe nous emmène aussi loin que faire se peut à chaque chanson. On pourrait se perdre dans le labyrinthe de leur son et ne jamais vouloir en sortir. Un rêve qui pourrait peut-être se réaliser le 16 février prochain au Botanique, nous l’espérons.

Ascendant Vierge – Influenceur

Le duo atomique composé de la chanteuse Mathilde Fernandez, que vous avez pu entendre avec La Femme ou Perez, et du DJ membre de l’écurie 100% énervée Casual Gabberz, s’est révélé en moins d’un an et quelques tracks aussi surprenantes que ravageuses. Influenceur, leur titre phare mêlant un BPM bondissant et des vocalises cristallines qui serrent nos cœurs, a enfin son clip. Et quel clip ! En association avec le studio Golgotha, la paire passe sous les filtres psychédéliques et Instagram-friendly d’une ribambelle de graphistes. La fête façon warehouse techno se transforme en trip halluciné où les prouesses digitales brouillent les limites du réel. Entre dégoût et réjouissance, les images sursautent sur la corde raide déjà tendue par le groupe. On entre dans la danse sans aucune hésitation. On verra plus tard pour le retour à la réalité.

Sylvan Esso – Rooftop Dancing

Un tour dans les commentaires du clip du nouveau morceau du duo américain Sylvan Esso, et voilà qu’un·e mystérieux·se internaute s’est déjà chargé·e de synthétiser les émotions qui nous traversent à l’écoute de Rooftop Dancing : “I’d almost forgotten what positivity sounds like.” Croyez-nous, ce deuxième extrait de leur prochain album est un pur moment d’évasion, de douceur et de bonnes vibes. Porté par la voix caressante de la chanteuse Amelia Meath et percuté par les sonorités électroniques de Nick Sanborn (la moitié “production” du duo), le morceau condense l’allégresse et la légèreté d’un pur instant de bonheur tout au long de cette composition délicieuse. La bande originale parfaite pour les séquences aussi simples qu’alléchantes d’une ville de New-York pleine de vie, capturée par la réalisatrice Cheryl DunnFree Love paraîtra le 25 septembre prochain, et on vous conseille vivement d’écouter les deux premiers extraits jusque-là.

Sufjan Stevens – Video Game

Ah, ce Sufjan Stevens, toujours une longueur d’avance ! Après nous avoir fait rêver sur Carrie & Lowell et pleurer sur la bande originale du merveilleux Call Me By Your Namele maître du songwriting continue de dévoiler son prochain opus The Ascension (prévu pour le 25 septembre prochain) avec bien des surprises. Le chanteur nous avait déjà prévenus : ce prochain disque sera “un album pop luxuriant” et un “terrible tournant”. Faisant suite aux complaintes sentimentales du sublime America partagé en juillet dernier (et long de douze minutes !), Video Game mêle la voix éthérée de Stevens à des touches de synthpop des années 80. Et si le combo ne vous étonne pas encore assez, c’est à Jalaiah, sensation TikTok ultra-virale et reine du fameux mouvement dit “renegade” que l’auteur-compositeur décidera de faire appel pour paraître dans un clip rétro, kitsch et lumineux orchestré par la graphiste Nicole Genelli. Le morceau est une petite pépite et c’est dans un déroutant mélange d’étonnement et de satisfaction que se chaloupent nos hanches sur du Sufjan Stevens.

King Krule – Comet Face

King Krule nous revient cette semaine avec le clip du quatrième titre de son album paru en février dernier. L’atmosphère lugubre rythmée de la basse menaçante et de trompette distordue nous donne déjà le ton dès les premières secondes de la vidéo. Archy Marshall vit manifestement un cauchemar éveillé dans un clair-obscur inquiétant. Lui, les autres protagonistes, tout le monde semble être pris d’une peur glaçante durant tout le clip. Un plot twist tombe alors à pic, en même temps que la chasse à l’homme prend fin. L’horreur va alors agir en deux temps : le monstre que tout le monde fuit n’est autre que le chanteur lui-même qui, lui aussi, prend peur face aux atrocités qu’il a commises. Subtiles, mais pas piquées, nous pourrons y voir ici des métaphores sociétales que le chanteur aime mettre en avant dans sa musique : “de qui sommes-nous les monstres ?” ou “ne serions-nous pas notre propre monstre ?” Pour comprendre et répondre à ces questions, nous vous invitons à aller (ré)écouter le troisième album délicieusement macabre de King Krule.

Yves Tumor – Strawberry Privilege

Bom Bom Bom Bom, we hung out sometimes. Un mélange de mélancolie glacée et de romance vaine signé Yves Tumor, le producteur de Warp Records qui mélange les genres sur son dernier album Heaven to a tortured mind. Si les ingrédients sont connus (une jazz bass, un chorus, un duo de voix désabusées), l’artiste américain réussit à trouver l’équilibre parfait pour décrire une relation qui est à la fois confortable et sans avenir. Un peu comme cette lyrics video sous forme de cassette VHS, un peu floue, minimaliste, mais qui retranscrit le message en laissant le superflu de côté. La fausse désinvolture du hook nous reste en tête depuis quelques jours. Une mélodie qui revient, lancinante, au fur et à mesure du morceau, comme une romance inaboutie. Quoi qu’il en soit, voici un formidable levier pour entrer dans l’univers dense et ésotérique du floridien de Warp Records.

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