Miso Extra et MSG : le rap anglo-nippon à emporter partout
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Auteur·ice : Anne-Sophie Rasolo
28/09/2023

Miso Extra et MSG : le rap anglo-nippon à emporter partout

Depuis 2022, une certaine Miso Extra court sur les ondes de la BBC. Dans une allégorie léchée, elle est venue clore l’été 2023 avec une pommade pour les oreilles nommée « MSG ». MSG, c’est le nom d’un exhausteur de goût asiatique, autrement appelé glutamate, ingrédient largement employé aujourd’hui : une autre façon d’assumer sa musique édulcorée et douce, entre RnB, rap et sonorités japonaises. Ce que l’artiste appelle « Umami pour les oreilles » vient les caresser d’une façon étonnante entre West Coast et soleil levant.

De premier abord, le packaging alléchant de la couverture de l’EP interpelle. Son flacon fait écho aux nouilles instantanées de son prédécesseur, Great Taste et souligne autant le sens du détail de Miso Extra que la volonté d’une continuité entre chaque opus. Pour ne laisser aucun doute, la synth pop présente dans les deux derniers morceaux de Great Taste s’étend dans l’introduction de son nouvel EP et formera même une enveloppe entière. À l’intérieur de celle-ci s’y trouvent les influences de J Dilla et de la West Coast, qu’elle mixe savamment avec ses origines nippones. Le morceau 50/50 est un très bon exemple du genre, une funk sucrée aux accents californiens flanquée d’une rythmique propre au bounce. D’une autre façon, Space Junk et son bruit métallique jalonnent une route en lacets qu’on l’imagine dessiner avec ses notes vocales, ouvrant sur le ciel.

Ce n’est pas seulement l’originalité mais la construction en elle-même de l’EP qui lui donne une certaine harmonie. Omniprésents, les synthétiseurs constituent la fondation de son univers. La chanteuse sculpte le son à son image, en s’inspirant du hip hop et du RnB, et en posant sa voix candide sur l’ensemble, celle-ci devenant alors le liant et colorant de son projet global. De la même manière que Kali Uchis le faisait en 2015 avec son EP Por Vida, Miso Extra pose son décors, doublé d’une cohésion d’ensemble. Aussi, le mix des genres musicaux, son propre métissage, et l’animé dont elle devient le personnage principal se rencontrent et donnent cette identité inclassable. Le clip de 50/50, de ce même morceau évoqué plus haut, parle de lui-même et plonge dans une sphère poétique et flashy.

Le monde de Miso Extra est parsemé de ses expériences de vie : parlant du chemin parcouru, de métaphores dessinées ou chantées, elle évoque la recherche de soi, et l’importance du détachement. Le ton « monotone » chanté dans les titres R10 ou Wise sert à la fois le spectre nippon et la moue tranquille qu’elle arbore. C’est là l’idée principale : tendre vers un équilibre entre sensibilité et maîtrise. Maîtrise qu’elle démontre dans la différenciation subtile de chaque morceau qui complète cet EP, tantôt entre ondulation et répétition vocales. Ajoutons à cela la balance entre musique old school et emploi d’outils actuels, réelle combinaison de fraîcheur.

Bien que l’on soit dans un tout autre registre, sa capacité à passer d’une langue à l’autre, à l’instar de November Ultra, nourrit son histoire. Si cette dernière fait cohabiter anglais et espagnol, Miso Extra opère une bascule fluide de l’anglais au japonais de façon à décliner plusieurs aspects de sa personnalité. C’est sans doute la force de cette jeunesse musicale, d’emprunter à l’héritage et à sa propre richesse pour créer du nouveau, sans contrainte. Le Misoverse est donc un monde à part, soigné dans son homogénéité et sa forme minimaliste, un monde que la rappeuse nous donne envie d’explorer. Nul besoin de comprendre tout ce qui se dit, suivre le tempo suffira largement à se laisser flotter.

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