On a pris une douce claque au concert de November Ultra
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Auteur·ice : Philomène Raxhon
06/12/2022

On a pris une douce claque au concert de November Ultra

Photos | Diego Mitrugno et Laura Collard

On a vu un concert de November Ultra au Botanique et on a mis deux semaines à en faire un live report parce qu’on a mis deux semaines à s’en remettre. C’était joli, c’était délicat, c’était parfois triste et parfois content, mais toujours beau. On en a tendrement pris plein les oreilles. Un disclaimer au passage, si vous vous surprenez à rire en lisant la suite, sachez que c’est elle qui est drôle, pas nous.

Sur la scène de l’Orangerie s’avance en cette soirée pluvieuse un rayon de soleil en robe mauve matelassée ornée de petites marguerites. November Ultra a des airs de petite fille et, on le sait, la voix d’une cantatrice. Le public l’attend, s’ébroue à sa vue et nous donne raison; un discret commentaire se dégage de la foule, “Elle est trop chou.” La Parisienne entame son set avec bedroom walls, titre éponyme de son premier album sorti en avril dernier. La salle respecte un silence solennel, elle le gardera tout au long de la soirée.

“Un peintre est venu refaire les murs de ma chambre, j’ai l’impression que c’est une new era de ma vie”. Nous aussi, à en croire les regards béats qui nous entourent, on a comme l’impression que des existences sont changées ce soir.  Munie d’une guitare rockabilly à la Elvis, November Ultra nous cueille avec Thelma et Louise, titre suivant qui n’a “rien à voir avec le film” même s’il parle d’une virée en voiture parce que “la réalité, c’est que je n’ai pas mon permis.” Le morceau raconte surtout la première fois où on arrive à dire “Je t’aime.Do you?, interroge l’artiste d’un timbre beau à en pleurer. Dans la foule, un moins poétique “Ah ouais !!!” s’élève. Ce soir, l’amour est réciproque. November Ultra se dirige vers son synthé pour y interpréter miel, titre tout doux mais piquant qui commence comme suit : I don’t wanna get married, Don’t wanna have your baby, baby. “Une nana m’a envoyé un dm pour me dire qu’elle allait chanter ça au mariage de sa soeur. Et elle l’a fait.”

Photo | Laura Collard

Sans transition (ou peut-être celle du marié transit), parlons dépression. over & over & over, morceau suivant, raconte celle de November Ultra. L’artiste est rejointe par un claviériste à pantalon funky venu ajouter une lueur cosmique à sa voix. Sur des paroles plus sombres qu’à l’accoutumée, l’interprète tient des notes qui ne sont pas de notre galaxie, mais du fond de la nuit (on se lâche). Premier titre de l’album, over & over & over est suivi d’open arms, single de clôture de l’album. Celui-ci, il est pour les anxieu·euses, celleux qui ont du mal à lâcher prise. “L’important, comme dirait ma psy, c’est de verbaliser.” Et bim, 60 euros de consultation. L’important, c’est surtout toute l’ampleur de la douceur de November Ultra. Tout simplement les plus beaux “ouuh ouh ouuuh” qu’il nous ait été donné d’entendre. Le titre nous rappelle Back, baby de Jessica Pratt. On aime tout ce qui nous rappelle Back, baby de Jessica Pratt.

Le morceau suivant est une spéciale dédicace à papy Ramon (Jambón?), le grand-père hispanique de November Ultra qui lui envoie des vidéos TikTok “style “passe un bon lundi” avec des fleurs en fondu.” L’artiste s’installe derrière une loop station, un de ces instruments qui créent des boucles de son à l’infini. Ses “ah” et ses “ouh” (oui, de très jolis “ouh”) ne la quittent pas de la chanson et se réverbèrent derrière sa voix toujours aussi prodigieuse. Dans la salle, on frissonne. Les titres en espagnols s’enchaînent, les minuscules doigts de November Ultra flottent dans l’air et imposent tout doucement un silence de cathédrale. Elle poursuit avec le manège que l’on attendait avec impatience. Une chanson pour valser, mais aussi pour se faire transpercer le coeur et en redemander. Don’t let this end, Take me in your arms, in your arms, implore celle qui, du haut de la scène de l’Orangerie, nous jette dans le vide et nous rattrape in extremis.

Photo | Laura Collard

“J’ai vu un de vos trésors nationaux en concert. Tamino est un dieu.” On ne peut qu’approuver. November Ultra nous raconte aussi la fois où son crush du lycée a slide dans ses dm’s et qu’elle en a fait une chanson en bonne scorpion qu’elle est. Une preuve de plus pour le fellow scorpio qui écrit ces lignes qu’on est décidément les meilleur·es. Tout en simplicité, le show se fait pourtant presque Broadway-esque et il nous apparaît soudain, sur les passages parlés, que November Ultra ferait une bien meilleure Barbara Streisand dans Funny Girl que Leah Michele, n’en déplaise aux Gleeks.

The End. vient après et nous rappelle, non sans nostalgie, Saint-Laurent de Coeur de Pirate. S’en suit nostalgia/ultra qui sonne comme un tableau de petits bateaux qui vogueraient sur une mer familière. November Ultra switche de l’Anglais à l’Espagnol, l’eau se trouble, le morceau s’intensifie. On manque de couler mais l’artiste, de sa voix aérienne, à l’image du magistral It’s Oh So Quiet de Björk, nous secoue et nous ramène à flots. Ok, fin du lexique sous l’océan et “fin du concert.”

Photo | Laura Collard

En guise de rappel, queen Ultra interprète novembre, “morceau de Noël un peu triste qui sort le 2 décembre.” Il est aussi réussi qu’un titre festif puisse l’être, porte en lui la même délicatesse qu’un album de Noël de Sufjan Stevens qui donne envie de serrer contre soi toute sa famille proche et éloignée devant un feu de cheminée alors qu’on peut pas blairer l’odeur de la suie et encore moins sa famille. Poppy Fusée, première partie de ce concert botaniquois (botaniquais? botanicien?), rejoint November Ultra pour jouer le titre qui aurait causé une émeute ni douce, ni tendre, si on ne l’avait pas entendu: soft & tender. Bonus à ne pas négliger : Poppy Fusée porte la même robe matelassée à petites marguerites mais en brun. Nous ne sommes que réjouissance. Les petits “better” entonnés à deux, les tenues assorties, c’en est trop pour nos petits coeurs. Et puis, que les puristes se rassurent, November Ultra conclu son set sur “Soft and tender, Ça veut dire doux et tendre” et Poppy Fusée d’ajouter “et c’est tout aussi joli en français”.

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