Ils l’ont rendue plus douce : nos albums coups de coeur de l’année 2020
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Auteur·ice : Rédaction
28/12/2020

Ils l’ont rendue plus douce : nos albums coups de coeur de l’année 2020

En cette fin d’année mouvementée, l’industrie musicale n’aura pas été épargnée, mais elle aura tout de même réussi à nous épauler, comme toujours, dans nos vies quotidiennes. Plutôt qu’un classement objectif des meilleurs albums de l’année 2020 que sont rompus à vous présenter la plupart des médias, la rédaction de La Vague Parallèle vous propose une sélection qui vient des tripes, qui vient du cœur. Ces albums ont été, pour chaque membre de la rédaction, un coup de cœur, une valeur sûre, un accompagnement sonore vital durant ces derniers mois. Francophones ou internationaux, passant du rap à l’hyperpop, s’étirant de la folk jusqu’au rock, ces disques sont ceux que l’on aimerait célébrer en rédaction en cette fin d’année. Bienvenue dans le reflet le plus authentique de notre équipe. Chacun·e d’entre nous vous dévoile sa pépite de 2020.


Laylow - TRINITY

Laylow – TRINITY (Digitalmundo)

Sélectionné par Paul-Louis

On savait avant même la sortie de TRINITY, grâce aux clips et au peu de promotion, que le fil rouge de l’album serait un univers cinématographique et digitalisé. Un univers qu’apprécie particulièrement Laylow, qui s’est toujours démarqué par des visuels surprenants et originaux. C’est encore le cas avec TRINITY ; une longue balade dans la nuit, pleine d’égotrip, de réflexions personnelles, d’émotions et de surprises. Un album rempli de pépites sonores comme dans DEHORS DANS LA NIGHT, avec un changement de prod assez incroyable. TRINITY, c’est un album qu’il faut écouter en entier, dans l’ordre du tracklisting, mais surtout prendre le temps de digérer. C’est le genre d’album que l’on aimerait pouvoir écouter tous les vendredis. Un album qui nous accompagne un certain temps et que l’on écoute en boucle dans son baladeur. Dans cette course acharnée aux ventes, il est souvent difficile de trouver des projets qui nous marquent. TRINITY, premier album de Laylow, fait partie de ces projets-là.

Jessie Ware – What’s Your Pleasure? (PMR / Virgin EMI Records / Universal)

Sélectionné par Gaston

Depuis 2012 et les impeccables Running ou If You’re Never Gonna Move, on attend chaque nouvel album de Jessie Ware avec une certaine impatience, captivés par la voix de la Londonienne qui nous cueille à chaque fois, même si elle peinait parfois à nous convaincre sur toute la durée d’un album. On ne s’attendait pas pour autant à la voir terrasser la concurrence 8 ans plus tard en 2020 avec un album aux influences disco, alors qu’il y avait Dua Lipa, Kylie Minogue ou Roísín Murphy en embuscade. Mais Jessie Ware did it, What’s Your Pleasure? est une suite ininterrompue de bangers, de l’ouverture sur Spotlight à Ooh La La, en passant par What’s Your Pleasure? ou Save A Kiss. Elle s’offre même le luxe de clôturer son album avec probablement sa plus belle ballade : Remember Where You Are. Il ne manquait qu’une chose cette année : des pistes de danse pour rendre un hommage décent à un de nos albums de l’année.



The Strokes – The New Abnormal (RCA Records)

Sélectionné par Caroline 

2020, c’était aussi l’année du retour des Strokes avec The New Abnormal (de circonstance, donc). Les Strokes nous offrent une vibe années 80 mélangée à un son futuriste, un peu à la façon d’un va-et-vient entre passé et futur qui rendent le présent bien plus intéressant. Plaire ou ne pas plaire, ce n’est vraiment pas l’optique du groupe, qui se préoccupe peu de faire de l’ancien Strokes. Ils peaufinent leur signature avec un peu d’ancien et de nouveau, pour un son presque apocalyptique, porté par le falsetto de Julian. Ces retours vers le futur vacillent sous des nappes d’instruments produites par le génial Rick Rubin (Red Hot Chili Peppers, AC/DC, Kanye West, James Blake,…) – à qui on doit ce son presque compresséLe projet traduit une conversation engagée entre chaque membre du groupe où chaque instrument a son importance. On ne peut que se réjouir d’avoir pu entendre des singles comme At The Door, qui est le symbole de la volonté du projet et qui plus est, un chef d’œuvre pour les oreilles. Sans oublier des titres comme Adults are Talking, Why Are Sundays So Depressing, et une mention très spéciale pour Ode To the Mets, le nouveau You Only Live Once du groupe. Bref, une apocalypse qu’on est presque ravi·es de vivre, à la pochette signée Jean-Michel Basquiat.

Pluralone – I Don’t Feel Well (ORG Music)

Sélectionné par Paul 

Pour marquer cette année au cours de laquelle rien ne se sera passé comme prévu, il fallait forcément un disque particulier. Deuxième disque solo de Pluralone après To Be One With You, qu’il avait révélé quelques mois tout juste après avoir quitté les Red Hot Chili Peppers, I Don’t Feel Well est précisément lié à cette drôle de crise. Cet opus à la beauté étrange nous aura apporté la dose de douceur et de réconfort dont on avait besoin en ces temps troublés, jouant le rôle d’album-pansement quand rien d’autre ne pouvait plus nous redonner le sourire. À la vérité, la musique de Josh Klinghoffer, son nom à la ville, nous aura suivi·es toute l’année à la faveur de ces reprises dépouillées, pleines de cette sincérité touchante qui est sa marque de fabrique. Elle aura aussi été à l’origine d’une rencontre merveilleuse, qu’on n’aurait jamais imaginée même dans nos rêves les plus fous. Surtout pas cette année.


Rina Sawayama – SAWAYAMA (Dirty Hit)

Sélectionné par Valentin

Prenez le côté pop punky d’Avril Lavigne et mélangez-le avec du nu metal contemporain. Ajoutez à cela quelques bonnes explosions de références et de genres, beaucoup d’audace et de talent et une empreinte personnelle. Rina Sawayama est comme à la croisée des mondes, tant musicalement qu’identitairement. Si les murs entre les genres musicaux s’effacent peu à peu, Rina a pris soin d’en dégommer les dernières briques. Véritable vortex d’influences, et n’ayant peur de rien pour narrer son essence et ses préoccupations, l’artiste a fait de son premier album, intitulé simplement mais symboliquement SAWAYAMA, une frappe musicale certes, mais surtout un disque d’une singularité criante. Entre des tacles contre les micro-agressions racistes (STFU!) et le consumérisme exacerbé (XS), une ballade sensible sur sa queer family (Chosen Family) ou son amour pour Tokyo (Tokyo Love Hotel), la Japonaise qui a grandi au Royaume-Uni – ce qui lui a valu d’être boudée par les Brit Awards (!) – est l’étendard d’une génération nouvelle : engagée sur le fond, détachée et expérimentale au possible sur la forme. Un exercice rare pour un premier album qui arrive à mixer intelligemment les influences, et produire un concentré à base de quête d’identité et de racines. Un manifeste générationnel ?

Népal – Adios Bahamas (Triple 4 Gear)

Sélectionné par Giulia

Adios Bahamas, sorti à titre posthume, est le premier album de Népal. Du 9 novembre 2019, on se souvient de la disparition de ce grand rappeur. De l’année 2020 on ne retient pas grand-chose, à part qu’à travers la musique on peut rendre immortel l’impossible. Adios Bahamas est en quelque sorte le dernier souffle de Népal qui laisse encore résonner sa voix dans nos écouteurs. Son flow, ses textes et son univers sont toujours bien là, comme si lui, il était toujours là. Ce projet est composé de 12 titres à son image : précision, spleen et un lien fort avec la culture japonaise. Dans les différents morceaux, le rappeur interpelle le monde dans lequel on vit, un monde pollué et qui se contredit. Trajectoire est un exemple de climax où le refrain reflète le questionnement introspectif de Népal qui est sûrement parti beaucoup trop tôt. Mais n’avait-il pas déjà tout dit ?


Bonnie Banane – Sexy Planet (Péché Mignon / Grand Musique Management)

Sélectionné par Adrien 

Depuis quelques années, tous les yeux de la scène alternative / R&B française sont rivés vers une poignée de nouveaux artistes US redéfinissant les codes et imposant disque après disque la tendance à suivre. Comme souvent, la France adapte presque trait pour trait ces schémas en produisant des artistes calqués sur les pionniers américains. Ichon essaye ainsi de revêtir le costume de Tyler, The Creator – avec succès ; Yseult trace sa route dans le sillon tracé par Lizzo ; Ben l’Oncle Soul (il revient !) tente tant bien que mal de mimer Anderson .Paak – avec plus de difficulté. Quant à Bonnie Banane, jusqu’alors dans l’ombre de Myth Syzer, de Flavien Berger et cantonnée au second plan dans des feats (réussis), elle peut s’affirmer et – enfin – réinterpréter Kali Uchis en francophonie. Le disque est un succès total, plein de malice et d’espièglerie ; Sexy Planet a par ailleurs l’intelligence d’y incrémenter l’esprit littéraire et poétique singulier à l’hexagone (on pense à Katerine, notamment) pour forger une œuvre parfaitement référencée tout en brillant par son originalité. Reste désormais à découvrir si, dans les prochaines années, Bonnie Banane va exploiter le boulevard qu’elle s’est ouvert – et user la recette jusqu’à la corde ? – ou bien si elle choisira de nous surprendre en prenant la tangente. On reste à l’affût !

Samba De La Muerte – Landmark (Collectif Toujours)

Sélectionné par Joséphine 

Si la quantité effraie parfois en musique, de peur de s’éloigner de la qualité, loin de là sont les intentions d’Adrien Leprêtre, qui nous habitue au sublime avec Landmark. Délicieuse bande son de l’été dernier, l’EP fait suite au magnifique album A Life with Large Opening, avec une minuscule gestation de neuf mois. Landmark réunit des collaborations de qualité qui permettent à Samba De La Muerte de présenter un projet qui expérimente, va plus loin, et nous surprend plus encore. Ça s’écoute, se réécoute et ne se lâche plus des oreilles, surtout les géniaux Backbone, Enough Is Enough et Mit Manade entre autres perles. Mêlant toujours les genres avec brio, l’équilibre reste maîtrisé à la perfection et l’on ne se lassera pas de sitôt d’en demander plus. À écouter aussi bien les yeux fermés que grands ouverts, à danser, vivre et laisser doucement prendre sa place dans nos cœurs.



Nicolas Godin – Concrete and Glass (Because Music)

Sélectionné par Mab

Concrete and Glass fait partie de ces albums dont on aime se souvenir et que l’on prend plaisir à écouter régulièrement, sans prédispositions particulières. D’une pureté cristalline, le dernier album de la moitié de Air fait le lien entre deux univers artistiques : la musique et l’architecture. L’inspiration suscitée par les édifices contemporains et leurs structures symétriques est la clé de voûte de Concrete and Glass. Nicolas Godin y travaille le son comme une matière première et le façonne tel un artisan pour en extraire la substantifique moelle. Le résultat est un véritable bijou de production sans aspérités. Ce recueil de ballades cosmiques aux constructions rusées fait le bonheur des fans de Moon Safari ! Il nous embarque dans un voyage intemporel et relaxant où notre esprit peut voguer librement et rêver d’un avenir meilleur. Morceau coup de cœur : The Border.

Rone – Room with a View (InFiné Music)

Sélectionné par Guillaume 

Arriver à créer de la musique électronique est aujourd’hui quelque chose d’assez abordable pour le grand public. FL Studio, Ableton et d’autres logiciels se sont démocratisés et énormément de producteurs peuvent démarrer leur carrière dans leur chambre. Mais arriver à faire parler sa musique électronique, c’est une prouesse dont peu d’entre eux sont capables. Dans Room with a View, presque aucune parole, si ce n’est un dialogue entre Alain Damasio et Aurélien Barrau. “Il s’agit simplement de consommer un peu moins, bordel ! Ce n’est quand même pas la fin du monde !”, crie ce dernier. L’album en lui-même est la suggestion d’un Nouveau Monde par Rone, un véritable questionnement de nos modes de vies, de cette société de consommation, de ce monde qui tourne beaucoup trop vite…Tout cela avec le regard singulier qu’il peut avoir sur la production électronique.  Avec Room with a View, Rone a composé bien plus qu’un album d’électro, il a créé son manifeste.



Eels – Earth to Dora (E Works / PIAS)

Sélectionné par Clémence

La réponse est claire et facile à voir. Elle est trop sombre et dramatique. Mais, on l’aime tellement, l’œuvre de Eels. Offerte fin octobre, elle teinte de bleu, marine parfois turquoise, les derniers mois d’une année peu commune. Elle calque fidèlement les quêtes, requêtes, les mous et remous avec lesquels nous jonglons chaque jour sous l’œil du clown. Lèvres arquées et paupières lourdes, lui aussi nous fait l’impression d’un miroir. Regarde, l’eau coule à mesure que les cordes et le clavier chantent secrètement Dark and Dramatic. Écoute, Are We Alright Again retient le mélodrame, Of Unsent Letters, le répand. Sens la proximité de ses mots, goûte l’espoir grandissant, l’authentique Waking Up. Une nouvelle fois, Monsieur E a sorti son célesta et le grand « Je ». L’effet d’une main que l’on surprend, sur notre épaule, ou celle que l’on se tend. Monsieur E se fout la paix et nous la vend. Merci Monsieur E, nous réveiller près de Earth to Dora est la seule chose que l’on veut vraiment.

Phoebe Bridgers – Punisher (Dead Oceans)

Sélectionné par Flavio 

L’emo folk qui nous avait gagné·es deux ans plus tôt sur Strangers In The Alp nous revient ici plus mature et aiguisée. Bridgers est parvenue à infuser un certain esprit funeste et morose, fil rouge de son univers, sur chaque composition de ce second album. Et si cette part d’obscurité hante délicieusement la majeure partie de l’opus, cela n’empêche pas une part de lumière de rayonner avec force sur l’exaltant Kyoto ou le léger Graceland Too, à titre d’exemples. Mais là où l’autrice-compositrice tire son épingle du jeu, c’est par son songwriting hors pair calibré entre poésie abstraite et désillusion réaliste. Punisher nous dévoile Phoebe Bridgers plus pertinente que jamais face aux thèmes de la perte, de la mort, et de la vie aussi. Un pur bijou d’écriture qui aura ponctué avec légèreté cette apocalypse.


pâle regard – Terrain Vague (Dirty Melody Records)

Sélectionné par Victor 

La mélancolie est un terme fourre-tout où l’on range beaucoup de choses, parfois à l’excès. Pourtant, il colle parfaitement à certains groupes. pâle regard est de ceux-là. Ceux qui, d’une mélodie, d’une nuance, vous font tourbillonner dans un torrent de scenarii où se côtoient souvenirs exquis et avenirs incertains. Porté par une synergie basse / guitare que ne renieraient pas les Red Hot Chili Peppers sur laquelle se dépose une voix de velours, l’EP Terrain Vague emprunte à la fois à la french touch, à la pop rosée ou au jazz. Au-delà de la locomotive Bus de nuit, on découvre un monde où chaque instrument reçoit un amour de traitements à base de réverb et de modulations plus délicieuses les unes que les autres. Aussi, ces quelques chansons libérées au cœur de l’hiver dernier nous ramènent à un autre temps, celui où l’on pouvait tomber amoureux un verre à la main, au détour d’un riff de guitare ou d’une texture synthétique. Un temps précis où le quintet lauréat de La Grande Party se baladait du Pop-Up du Label au FGO Barbara, pour des instants atmosphériques qui appelaient à des lendemains qui chantent.

Nathaniel Rateliff – And It’s Still Alright (Stax Records)

Sélectionné par Hugo 

Cette année fut aussi marquée par le lumineux retour aux sources folk de Nathaniel Rateliff, ayant eu besoin de se retrouver face à lui-même, face à ses peurs, ses manques, ses peines et ses joies, le temps d’un instant. Cet amoureux de la folk brute et intime nous dévoilait ainsi en février dernier son nouvel opus, And It’s Still Alright, indéniablement le plus sincère jamais écrit par le singer-songwriter américain. On y retrouve Rateliff, sublimant sa plume grâce aux sonorités authentiques de ses débuts. Une guitare acoustique et la voix rauque de l’artiste suffisent alors pour nous transporter pendant près de 45 minutes. Et si l’inspiration derrière cette œuvre d’art réside dans la perte d’êtres chers à l’artiste, la lumière et l’espoir qui ressortent de ses 10 titres arrivent à nous réchauffer l’âme de la plus jolie des manières. Et si cette sombre année se termine dans quelques jours, nous pouvons retenir ces quelques mots échangés lors de notre rencontre en janvier dernier : « Je suppose que c’est important de trouver cette joie, car si on ne voyait que le négatif partout, on vivrait dans un monde sans espoir. »



Kevin Morby – Sundowner (Dead Oceans)

Sélectionné par Capucine

Un album qui est sorti assez tardivement dans l’année, mais salvateur et qui est le partenaire idéal pour de bons moments. Seul·e ou accompagné·e ! De base, Kevin Morby est déjà dans notre cœur mais il a su nous réchauffer en cette fin d’année avec sa folk perdue dans la solitude. Comme nous, il a vécu le confinement (et une tournée qui saute aussi). De son côté, l’isolement n’a pas été une raison de se laisser abattre, bien au contraire. Il a fait son petit travail dans sa maison texane, tranquillement, sans pression. Ainsi, il a été capable de créer une tout autre énergie au service de l’espoir comme avec Brother, Sister ou encore Valley. On se retrouve tous un peu dans Don’t Underestimate Midwest American Sun avec une poésie sans faille et profonde. Concernant Velvet Highway ou Sundowner, ils ramènent des sentiments diffus et enflamment le plus profond de soi. Le reste de l’album plante un décor parfait pour se la jouer folk américaine dans son 15m2. La solitude n’a jamais été aussi bien vécue.

Frenetik – Brouillon (Jeunes Boss / Label Blue Sky)

Sélectionné par Augustin

Après le raz-de-marée sous forme de consécration du “rap made in Belgium” qu’a été l’année 2016, 2020 ressemble fort au creux de la vague. En effet, mis à part un Damso qui continue sa spectaculaire ascension en solo et un excellent troisième album offert par un Isha qui n’empêche pas ce dernier de rester honteusement sous-coté, on n’a pas vraiment eu grand-chose à se mettre sous la dent. Du coup, l’arrivée providentielle de Frenetik sur nos radars a eu des airs de petit miracle. En seulement un EP (et une performance Colors difficilement critiquable), le “petit” protégé du label Jeunes Boss a mis littéralement tout le monde d’accord. Et pour cause, Brouillon est sans doute une des cartes de visites les plus percutantes qu’il nous ait été donné d’écouter. Jamais dans la surenchère et toujours au service du propos, chaque punchline fait mouche avec une précision chirurgicale. Ajoutez à cela un flow plus carré que Bob l’Éponge, une diction irréprochable au services de textes magistraux, et vous obtenez un des artistes les plus excitants de sa génération.



Glass Animals – Dreamland (Wolf Tones Records / Universal)

Sélectionné par Jeremy

S’évader de cette année, c’était notre but à tous. Et Dreamland a été notre principal compagnon dans cette quête. Sorti 4 ans après How to Be a Human Being, qui a épinglé Glass Animals sur la carte de la pop indé, l’album et ses 16 plages nous ont littéralement permis de traverser 2020. Dreamland est d’abord une succession de hits : Tokyo Drifting (en feat avec le rappeur le plus chaud du moment, Denzel Curry), Your Love (Déjà Vu), Heat Waves (n°1 incontesté du classement annuel Spotify), Tangerine, Hot Sugar… mais pas que. On tient aussi entre nos mains un album concept, axé sur la vie et les souvenirs du chanteur Dave Bayley (notamment matérialisés par des extraits sonores de vidéos amateur tournées par sa mère). Bourré de références que seul·e·s les kids un peu nerds des années 90/2000 repèreront, Dreamland réinvente une certaine idée de la pop d’il y a 20 ans. Moitié nostalgique, moitié dans l’air du temps, il synthétise parfaitement la vibe Glass Animals : autant sombre que lumineux, autant introspectif que libérateur. Et aussi cohérent que réconfortant.

Tim Dup – Qu’en restera-t-il ? (Sony Music France)

Sélectionné par Julia

Le doute n’aura peut-être jamais été aussi présent qu’en cette année 2020. Et pour accompagner cette crise existentielle à rallonge, on peut compter sur la jolie poésie de Tim Dup. Avec Qu’en restera-t-il, le chanteur signait en janvier dernier un second album bouleversant aussi sombre que lumineux. Un disque qui pose la question du temps qui passe et de l’empreinte de l’homme dans ce monde. Et Tim Dup sait comment apporter de la beauté à l’anxiété. Réalisé avec Damien Tronchot et Renaud Letang, ce second album est aussi doux que le précédent, tout aussi sincère, mais plus engagé peut-être. Il vous paralyse et vous donne de la force en même temps. L’impression qui s’en dégage est celle d’une furieuse envie de vivre mêlée à l’angoisse d’un futur incertain, faisant ainsi de chaque moment une précieuse éternité. Comme un câlin qui permet de penser à un demain meilleur.



King Krule – Man Alive! (XL Recordings & Matador Records)

Sélectionné par Chloé

Quoi de mieux qu’un disque intitulé Man Alive! pour illustrer une année aussi chaotique que celle que nous venons de traverser ? Troisième album du jeune Londonien, Man Alive! s’est vite hissé au sommet de la pile des disques à écouter inlassablement sur nos platines. Il faut l’avouer, le talent d’Archy Marshall n’a su, une fois de plus, passer inaperçu à l’écoute de ce dernier opus puisant dans des influences diverses et faisant de ce disque un incontournable inclassable. À travers ce qui s’apparente à un recueil de poésies, Krule chante et parle ses pensées avec une voix brute, grave et sombre à la croisée du hip hop et du post punk. Une voix lourde et présente rejointe par la guitare qui occupe toujours une place centrale au sein de cet album : les guitares crient, ragent. La singularité de King Krule a de quoi diviser mais ne peut laisser indifférent. Un résultat atypique qui fait de Man Alive! un disque psychédélique au son distordu et dissonant mais tout aussi novateur, qui nous plonge dans un climat orageux parsemé tout de même de quelques éclaircies, à l’image de cette année 2020.

Platon Karataev – Atoms (Platon Karataev)

Sélectionné par Joseph

Il est de ces albums dont l’incandescence submerge jusqu’à nos peurs les plus résistantes. Alors que 2020 semble vouloir assombrir nos rêves, épuiser nos joies et réveiller nos instincts de survie les plus inhumains, le furioso de Platon Karataev souffle la vie et la beauté dans nos cœurs. Une vie dévorante s’échappe des onze pistes du second LP du quatuor hongrois. Une vie qui explose sur Ocean, se fissure sur Wide Eyes mais dont les rafales cathartiques de Disguise et les grondements magnétiques et stellaires d’Aphelion ravivent à jamais la respiration. Au fil des chansons, les musiciens s’égarent, s’interrogent, reviennent sur leurs pas, s’enfuient, se décident finalement à poursuivre leurs chemins sur la crête. Ils brandissent haut leurs doutes universels, rugissent leurs errements éternels et exposent leurs faiblesses essentielles. En leur compagnie, nous explorons notre nature et contemplons nos limites. Et au bord de l’abysse, aussi effrayé·es que fasciné·es, écoutons une nouvelle fois l’album.


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